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Politique monétaire«L'idée d'un fonds souverain pour la BNS est une illusion»

L'idée de créer un fonds souverain avec les réserves de change de la Banque nationale suisse constitue une fausse bonne idée, selon Jean-Pierre Roth, ancien président de l'institut d'émission.

Jean-Pierre Roth a présidé la Banque nationale suisse jusqu'à fin 2009.

Jean-Pierre Roth a présidé la Banque nationale suisse jusqu'à fin 2009.

Keystone

Selon Jean-Pierre Roth, il importe que la Banque nationale suisse (BNS) dispose de ses réserves «lorsque la situation internationale se normalisera». Leur acquisition ces dernières années signifie que la banque centrale «a dû intervenir massivement pour protéger le franc de la spéculation, indique-t-il dans une interview parue mercredi dans L'Agefi.

«Il en est résulté une dilatation très forte de la liquidité intérieure. Celle-ci est aujourd'hui près de cinq fois supérieure à son niveau d'avant la crise», précise le retraité qui siège désormais dans les conseils d'administration de Nestlé, Swiss Re, Swatch Group et la Banque cantonale de Genève.

Lutter contre l'inflation

Cette situation «exceptionnelle» devra être corrigée quand la crise de l'euro sera résorbée, explique encore Jean-Pierre Roth. «Il faudra alors que la BNS puisse revendre les devises acquises pendant la crise.»

«Elle ne pourra le faire que si elle en dispose librement, ce qui ne serait pas le cas si ces montants étaient placés en actions ou en participations dans des entreprises étrangères, des marchés à plus faible liquidité.»

«Ne privons pas la BNS des instruments nécessaires à mettre l'économie suisse à l'abri des risques inflationnistes», résume le Valaisan. Ce dernier parle d'illusion quand les adeptes d'un fonds souverain affirment que l'instrument protégerait la Suisse des risques de change liés à de nouveaux accès de faiblesse de l'euro.

Des réserves en pagaille

A fin mars, la BNS disposait de réserves de change de 250 milliards de francs. Selon certains, ces réserves auraient gonflé de 50 à 60 milliards au cours des quinze derniers jours, rapporte Paul Dembinski, directeur de l'Observatoire de la finance, dans une tribune parue dans La Liberté.

«Aujourd'hui, les coffres de la BNS contiendraient des dollars et des euros en pagaille», relève le professeur qui s'empresse de qualifier cette richesse de virtuelle. A ses yeux, l'apparition récente et diffuse de l'idée de constituer un fonds souverain à la mode helvétique n'est pas anodine.

«En effet, elle pourrait bien signifier que la BNS explore activement les possibles voies de sortie (...) de la politique de résistance à l'appréciation du franc contre l'euro, mais aussi contre le dollar.» Une politique qui a commencé bien avant la fixation d'un cours plancher face à l'euro le 6 septembre 2011.

Paul Dembinski résume l'enjeu du prix à payer de cette politique par une phrase qui conclut son billet: «Aujourd'hui, la facture de la folie des grandeurs du petit pays balloté par une monnaie surdimensionnée serait donc en voie d'être présentée à l'encaissement».

(ats)

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