FranceMontebourg, Filippetti et Hamon quittent le gouvernement
Le ministre de l'Économie Arnaud Montebourg, ainsi que ceux de l'Education et de la Culture, ont annoncé qu'ils quittaient le gouvernement.
L'exécutif dans la tempête: Manuel Valls était à la manœuvre lundi pour constituer une nouvelle équipe gouvernementale sans Arnaud Montebourg, Aurélie Filippetti ni Benoît Hamon, débarqués pour avoir contesté le cap économique fixé par le chef de l'Etat.
Après Arnaud Montebourg et Aurélie Filippetti, c'est Benoît Hamon qui a annoncé lundi soir sur France 2 qu'il ne «participerait pas» à l'équipe Valls 2, dévoilée mardi. A une dizaine de jours de la rentrée scolaire, Benoît Hamon a, comme ses anciens collègues présenté son départ comme un choix personnel, cinq mois à peine après sa nomination rue de Grenelle.
«Il aurait été incohérent, alors que j'ai exprimé un désaccord avec un point important de la politique économique et sociale du gouvernement, que je reste au gouvernement», a expliqué M. Hamon, qui a toutefois assuré rester dans la majorité. Il a aussi invoqué le risque d'une victoire du Front national en 2017 pour justifier sa demande d'une inflexion économique.
Démission de l'ensemble du gouvernement
Après un week-end agité par les déclarations anti-austérité d'Arnaud Montebourg dans les pages du Mondeet ensuite depuis son fief de Frangy-en-Bresse, le couperet est tombé dès lundi matin: le Premier ministre a présenté à François Hollande la démission de l'ensemble du gouvernement, après cinq mois à Matignon.
Manuel Valls, reçu pendant une heure lundi matin par le chef de l'État et puis en fin de journée, est désormais chargé de constituer, d'ici mardi, une «équipe en cohérence avec les orientations» que François Hollande «a lui-même définies pour notre pays». Il a passé la journée à recevoir un à un à Matignon les ministres démissionnaires.
Montebourg «reprend sa liberté»
Le futur gouvernement se fera également sans Arnaud Montebourg: depuis Bercy, il a assuré avoir dit au Premier ministre qu'il «reprenait sa liberté» - ce que Manuel Valls a accepté - faute d'être entendu sur la nécessité selon lui, de «proposer des solutions alternatives» à la politique d'austérité menée en France. Il se retrouve désormais avec pour seul mandat celui de conseiller général de Saône-et-Loire.
«La présidentielle est la seule élection à laquelle j'envisage de me représenter un jour», confiait Arnaud Montebourg il y a environ un an.
Ce sera aussi sans Aurélie Filippetti: l'ex-ministre de la Culture a pris les devants, disant n'être «pas candidate à un nouveau poste ministériel» car elle préfère «la loyauté à ses idéaux» au «devoir de solidarité» gouvernementale, dans une lettre au duo Hollande-Valls. «Faudrait-il désormais que nous nous excusions d'être de gauche ?» interroge-t-elle.
Hollande muet sur la crise
Drôle de destin, alors que ce sont ces trois ministres qui avaient activement manœuvré pour que Manuel Valls accède à Matignon.
Selon une source gouvernementale, «Matignon cherche également des noms pour remplacer Christiane Taubira» à la Justice. Le nom de Bertrand Delanoë, l'ex-maire de Paris, circulait comme à chaque remaniement.
François Hollande lui n'a pas dit un mot sur cette phase critique de la vie gouvernementale. Il s'est exprimé, sous une pluie battante, vêtements et visage trempés, à l'île de Sein (Finistère) pour le 70e anniversaire de la Libération du pays, rendant hommage à la Résistance de l'île face à l'Allemagne nazie.
«Consensus absolu» au sujet d'une démission
Qui a pris la décision d'une démission ? Selon l'Élysée, la démission du gouvernement a fait l'objet d'un «consensus absolu» entre les deux hommes. En tout cas, pour Manuel Valls, il s'agit de se démarquer de l'époque Ayrault, marquée par de multiples «couacs».
Selon un conseiller gouvernemental, François Hollande «a poussé une grande colère», aux Comores samedi, au moment de la parution de l'interview de Arnaud Montebourg, alors qu'il avait publiquement minimisé la portée de ces propos.
Doutes sur la présence des Verts
A quoi ressemblera son gouvernement ? L'ex-secrétaire d'État aux Relations avec le Parlement, Jean-Marie Le Guen, s'est dit «confiant» sur le fait que la majorité «restera très largement majoritaire» à l'Assemblée nationale.
Emmanuelle Cosse, la numéro un d'Europe Écologie-les Verts a toutefois prévenu que sur la question d'une participation des écologistes au gouvernement, «les conditions étaient encore moins réunies aujourd'hui qu'en avril», au moment de la formation du gouvernement Valls. «On ne nous l'a pas proposé», a-t-elle également précisé.
Ci-dessous, quelques réactions au sein des différents partis:
Montebourg très critique
Arnaud Montebourg, invité d'Europe 1 lundi matin peu avant l'annonce de la démission du gouvernement, avait persisté dans sa critique du cap fixé par François Hollande, assurant toutefois qu'il ne se plaçait pas «dans l'hypothèse» d'un départ.
Aux commandes depuis le printemps d'un grand pôle ministériel économique, Arnaud Montebourg, 51 ans, a multiplié au cours de sa carrière politique les coups d'éclat.
Dimanche, à Frangy-en-Bresse, il avait reconnu avoir demandé à François Hollande une «inflexion majeure de notre politique économique», après avoir, samedi, dans Le Monde, demandé de «hausser le ton» vis-à-vis de l'Allemagne, quand François Hollande, mercredi, lui, déclarait ne pas vouloir de «face à face» avec Berlin.
Implosion suite aux résultats économiques
Arnaud Montebourg représentait, avec Benoît Hamon, la caution de gauche du gouvernement. Il avait d'ailleurs pris du galon avec le gouvernement Valls en élargissant son portefeuille à l'Économie, outre le Redressement productif qu'il détenait depuis mai 2012.
L'implosion du gouvernement intervient après des résultats économiques désastreux - avec notamment une croissance nulle au 1er semestre - et peu avant les chiffres du chômage (publiés mercredi) qui ne cessent de battre des records.
Dissolution proposée par le FN
Plusieurs responsables politiques de tous bords ont envisagé lundi une dissolution en réponse à la crise gouvernementale, telle la présidente du Front National, Marine Le Pen, mais aussi François Sauvadet, vice-président de l'UDI.
Luc Chatel, secrétaire général de l'UMP par intérim, a qualifié de «grave» «la crise politique ouverte par la démission du gouvernement». Même constat pour le président du MoDem, François Bayrou, pour qui la France n'est «pas loin de la crise de régime».