EgypteMorsi refuse l'ultimatum fixé par l'armée
L'armée égyptienne a donné lundi 48 heures à Mohamed Morsi pour satisfaire les «demandes du peuple», faute de quoi elle imposerait une feuille de route. Mais le président a refusé l'ultimatum.
L'armée égyptienne a donné lundi 48 heures à Mohamed Morsi pour satisfaire les «demandes du peuple», faute de quoi elle imposerait une feuille de route, après des manifestations de masse réclamant le départ du président islamiste. Le chef de l'Etat a rejeté l'ultimatum.
Dans une déclaration lue à la télévision, le général Abdel Fatah al Sissi, nommé à son poste par Mohamed Morsi, n'a pas demandé explicitement le départ du chef de l'Etat issu des Frères musulmans.
Mais il a prévenu que l'armée présenterait sa propre «feuille de route» pour sortir de la crise si les dirigeants politiques n'arrivent pas à trouver une solution de compromis qui permette d'inclure toutes les forces politiques.
Les opposants toujours mobilisés place Tahrir au Caire ont explosé de joie après cette déclaration qui pousse, selon eux, le président vers la sortie comme ils le réclament.
Manifestations de joie
M. «Morsi n'est plus notre président, Sissi avec nous», ont scandé les manifestants. Après l'annonce de l'armée, des dizaines de milliers de manifestants enthousiastes ont défilé dans les rues du Caire, d'Alexandrie et d'autres grandes villes du pays.
«L'armée s'est rangée au côté du peuple», a estimé le mouvement Tamarrod (rébellion en arabe), à l'origine de manifestations monstres dimanche. Six membres du gouvernement ont présenté leur démission, accroissant l'isolement de M. Morsi.
Mais le chef de l'Etat a implicitement rejeté dans la nuit de lundi à mardi cet ultimatum lancé par les militaires qui avaient pris les rênes de l'exécutif pour un intérim controversé entre la chute du président Hosni Moubarak en février 2011 et l'élection de M. Morsi en juin 2012.
Affirmant que «l'Egypte ne permettra absolument aucun retour en arrière quelles que soient les circonstances», M. Morsi s'est posé en garant de la «réconciliation nationale» et de la «paix sociale», après que l'armée avait déclaré la semaine dernière qu'elle ne laisserait pas le pays «plonger dans un tunnel sombre de conflit et de troubles».
Appel à la retenue d'Obama
Les Frères musulmans, la formation d'où vient M. Morsi, se sont contentés de déclarer qu'ils «étudiaient» la déclaration militaire.
En visite en Tanzanie, le président américain Barack Obama a invité «toutes les parties à faire preuve de retenue» tandis que l'ONU a appelé au dialogue, en soulignant que l'issue de cette nouvelle crise aurait un «impact important» sur l'évolution des autres pays de la région.
Dimanche, la foule avait déferlé dans la capitale et dans de nombreuses autres villes aux cris de «Le peuple veut la chute du régime», le slogan déjà scandé début 2011 contre le pouvoir autoritaire de M. Moubarak.
Au moins 16 personnes ont été tuées dans tout le pays en marge des manifestations, dont huit dans des affrontements entre pro et anti-Morsi au Caire, selon le ministère de la Santé.
Siège des Frères musulmans incendié
L'armée et la police sont déployées dans le pays pour éviter des dérapages graves, en particulier autour des établissements vitaux. Malgré cette mesure, le siège des Frères musulmans, dont M. Morsi est issu, a été en partie incendié au Caire dans la nuit, avant d'être occupé et pillé lundi matin.
L'opposition avait appelé à manifester le jour anniversaire de l'investiture de M. Morsi. Les cortèges de dimanche, d'une ampleur sans précédent, ont lancé «La révolution du 30 juin», affirmait lundi le quotidien indépendant «Al-Masry al-Youm».
Après avoir récolté 22 millions de signatures pour une pétition réclamant le départ du président accusé de dérive autoritaire et de laisser la mainmise aux Frères musulmans sur le pays, Tamarrod a donné à M. Morsi jusqu'à mardi 17h00 pour quitter le pouvoir. En cas de refus, le mouvement a annoncé «une campagne de désobéissance civile totale».
L'instabilité persistante en Egypte, pays le plus peuplé du monde arabe avec plus de 80 millions d'habitants, pèse lourdement sur une économie handicapée par une inflation et un chômage en hausse ainsi que la chute de sa monnaie.