A quoi rêvent les Romands cette semaine? Au retour du soleil et à 32,3 millions de francs. C'est en effet le montant record de la cagnotte que Swiss Loto met en jeu demain. Pourtant, à en croire les riches que «Le Matin» a consultés, les Romands feraient peut-être mieux d'espérer le soleil que les billets. Pourquoi diable?

Les rêveurs vont détester: «Recevoir du jour au lendemain 32 millions bouleverse les équilibres personnels et familiaux ainsi que les amitiés», met en garde Jean-Claude Biver, président du conseil d'administration de Hublot. Qui dit «avoir eu la chance d'amasser petit à petit sa fortune», laquelle est évaluée par le magazine Bilan entre 100 et 200 millions. Patrick Delarive, homme d'affaires vaudois à la fortune estimée équivalente, va encore plus loin. Lui, dont c'est le métier de conseiller les riches, compare la violence du choc pour le futur gagnant à celle d'un divorce! «L'argent crée le pouvoir, la jalousie, l'intéressement. Le regard des autres sur vous change. La vulnérabilité est énorme.»

Diantre, vue sous cet angle, l'affaire à l'air sérieuse et les retombées néfastes pour le malheureux gagnant. Et Christian Constantin, le très décomplexé président du FC Sion dont la fortune se situerait, selon Bilan, entre 200 et 300 millions, se montre-t-il aussi négatif? Pire encore: «Le risque est grand d'être dépecé par les chacals. Rares sont ceux qui ont gagné à la loterie et qui n'ont pas fini ruinés. Certains me font penser à ces jeunes footballeurs africains qu'on fait venir en Europe et qui sont finalement lâchés par leurs managers.»

Une comparaison que ne goûte pas Jean-Luc Moner-Banet, patron de la Loterie Romande: «La majorité des joueurs, assure-t-il, vivent bien leur fortune.» Comme sa société, dont le chiffre d'affaires a progressé d'environ 10%. «Car si l'EuroMillions offre des jackpots plus élevés, Swiss Loto a l'avantage d'être tiré en Suisse seulement!» explique-t-il.

Alors, que doit faire l'heureux gagnant pour le rester? Jean-Claude Biver: «Partagez, par exemple à travers une fondation. Gérez cette somme sans prise de risques. N'arrêtez pas de travailler, sauf si, mécanicien, vous avez la passion des roses: payez-vous alors une roseraie. Mais surtout, ne changez pas de style de vie! Ne décollez pas, restez connectés à la terre.» La preuve par l'acte: l'entrepreneur nous a répondu depuis Ramatuelle où il était en vacances. Au camping! «Parce que c'est là qu'on partage le mieux les frites et les pains au chocolat».