HygièneNos mains peuvent abriter des millions de bactéries et de virus
Nos mains en contact avec une infection ou des selles peuvent transmettre jusqu'à 10 000 milliards de bactéries en serrant celles d'autrui. Et les virus du rhume ou de la grippe y survivent des heures!
- par
- Elodie Lavigne ,
- en collaboration avec: www.planetesante.ch

Il semble que le sommet de l'épidémie de grippe a été atteint en Suisse romande. Mais d'autres infections, surtout d'origine virale, continuent de circuler. Pour éviter d'attraper des microbes et surtout de les transmettre, se laver les mains reste la mesure d'hygiène la plus élémentaire, mais aussi la plus efficace.
L'épidémie de grippe semble avoir atteint le sommet de sa courbe épidémique fin janvier, mais ce n'est pas pour autant la fin des infections de l'hiver. De nouvelles vagues de grippe peuvent encore sévir tandis que d'autres infections, surtout d'origines virales, circulent actuellement. Selon les derniers screening des virus respiratoires des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG), la grippe – causée par le virus influenza – reste en tête des infections respiratoires, suivie par le virus respiratoire syncitial (VRS), qui touche majoritairement les jeunes enfants. Les rhinovirus, responsables des rhumes, semblent être peu présents ces jours, et pour cause, ils sévissent en effet principalement en dehors de la saison de grippe.

Nos mains, elles, sont un vecteur majeur de transmission. Elles véhiculent les microbes de plusieurs manières: soit par contact direct (une poignée de main); soit par contact indirect, lorsqu'on touche un objet contaminé (un verre, une poignée de porte, un billet de banque, une serviette, par exemple). Elles peuvent aussi infecter par autocontamination, lors d'un contact des mains avec les yeux, la bouche ou le nez avec des mains souillées. Il existe aussi des infections directes lors de contacts rapprochés tels que bises ou baisers. Enfin, les microbes peuvent se transmettre par l'intermédiaire de gouttelettes ou d'aérosols, qu'une personne malade expulse lorsqu'elle parle, postillonne, tousse ou éternue. Ces milliers de gouttelettes ou ces aérosols restent en suspension dans l'air ambiant et sont capables d'infecter à distance.
Nids à virus et à bactéries
Lorsqu'une personne malade se mouche ou éternue, on retrouve dans ses mains entre dix mille et 1 million de virus. Des chiffres approximatifs puisque tout dépend du type de virus, du stade de la maladie et de l'âge de l'individu concerné, nuance Caroline Tapparel Vu, professeure assistante au département de microbiologie et de médecine moléculaire à la Faculté de médecine de l'Université de Genève (UNIGE): «Dans le cas des rhinovirus, la charge virale augmente durant les premiers jours de l'infection, avec un pic entre le deuxième et le quatrième jour après l'apparition des symptômes.» Mais attention: la contagion peut débuter un à deux jours avant le moindre symptôme. Au bout de cinq jours, en revanche, on cesse d'être contagieux. En cas de grippe, les choses sont assez semblables, poursuit le professeur Didier Pittet, chef du service de contrôle et de prévention des infections aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG): «La charge virale est importante au début de la maladie, car la production d'anticorps et nos défenses immunitaires ne sont pas au maximum. Les personnes qui ne se sont jamais fait vacciner ou qui ont été peu exposées à ce genre de virus sont beaucoup plus contagieuses.» C'est le cas des très jeunes enfants, «qui sont porteurs d'une plus importante charge virale en raison d'une faible exposition préalable à ces virus et d'un système immunitaire moins mature», poursuit la professeure Tapparel Vu. C'est pourquoi les enfants émettent beaucoup de virus lorsqu'ils éternuent. De plus, ils ont tendance à oublier de mettre les mains devant la bouche et se les lavent moins souvent.
Nos mains sont de vrais nids à bactéries. Selon des tests effectués en laboratoire, «on peut potentiellement transmettre de 100 000 à 100 millions de bactéries en serrant la main d'autrui», illustre le Pr Pittet. Un nombre qui atteint 1000 à 10000...milliards si les mains ont été en contact avec des selles. Les bactéries survivent et se multiplient plus volontiers si elles se trouvent dans un milieu chaud et humide. Elles préfèrent en effet les surfaces vivantes (notre peau et les plis de notre corps) aux surfaces inertes sur lesquelles elles sèchent et meurent plus vite.
Questions de survie
La survie des virus dépend de plusieurs paramètres: type de virus, surface, milieu, température, humidité, etc. Sur les doigts, les virus de la grippe et du rhume survivent sans problème deux heures au moins, a observé Caroline Tapparel Vu. Sur les billets de banque, leur résistance est impressionnante: «Selon nos études, le rhinovirus survit plus de cinq jours, celui de la grippe jusqu'à trois. La présence de mucus nasal augmente leur résistance.» Il semble par ailleurs que plus la concentration virale est importante, plus longue est la survie et meilleure est la transmission. Le virus de la grippe se plaît en hiver: «Il résiste mieux dans un environnement sec et froid. Et se transmet d'autant plus facilement que les gens se confinent dans des milieux clos, ce qui favorise les contacts rapprochés et donc la transmission. Enfin, il semble que le froid lui-même fragilise les muqueuses respiratoires, facilitant ainsi l'entrée des virus dans le corps.»
Pour nous infecter, en effet, le virus de la grippe ou un microbe quelconque doivent pénétrer dans notre organisme. À la suite de cette entrée, la capacité de résistance de notre corps dépend principalement de notre mémoire immunitaire (acquise lors de précédentes infections ou lors de vaccinations).
Le moyen le plus efficace pour se prémunir des microbes reste le lavage fréquent et rigoureux des mains, soit avec de l'eau chaude et du savon, soit, encore plus efficacement, avec une lotion hydroalcoolique. «Grâce à cette solution, on supprime entre 100 000 et 1 million de bactéries, en 15 secondes seulement. Avec de l'eau et du savon, on ne dépasse jamais le millier ou une dizaine de milliers», conclut le professeur Pittet. Sachez-le, il n'est pas inutile de garder ses distances – un mètre au minimum avec les personnes victimes d'une infection respiratoire, et d'avoir une hygiène appropriée.