MigrationNouveaux heurts à la frontière gréco-turque
Des policiers grecs et des migrants se sont affrontés ce vendredi aux abords d'un poste-frontière au nord-est de la Grèce.
Des grenades lacrymogènes ont été tirées ce vendredi à la frontière entre la Grèce et la Turquie.
De nouveaux heurts ont brièvement éclaté vendredi à la frontière gréco-turque entre policiers grecs tirant des grenades lacrymogènes et des migrants lançant des pierres, a constaté l'AFP, une semaine après qu'Ankara a annoncé l'ouverture de ses portes avec l'Europe.
Après cette brève poussée de fièvre, des centaines de migrants se sont massés devant le poste-frontière de Pazarkule (Kastanies, côté grec), scandant «liberté», «paix» et «ouvrez les portes!», selon un photographe de l'AFP.
Certains brandissaient au-dessus des barbelés des pancartes sur lesquelles on pouvait lire «Nous voulons vivre en paix». «Nous voulons simplement une meilleure vie, une situation meilleure, vivre en liberté», explique à l'AFP Amir Massoud, un Iranien, masque sanitaire sur le visage pour se protéger du gaz lacrymogène.
Les autorités grecques ont accusé les forces turques de tirer des grenades lacrymogènes et des fumigènes du côté grec de la frontière. «Il y a eu des attaques coordonnées ce matin», a déclaré un responsable grec.
Découper les grillages
Selon Athènes, les autorités turques distribuent en outre du matériel pour découper les grillages empêchant les migrants de passer du côté grec.
Après l'annonce le 28 février par le président Recep Tayyip Erdogan de l'ouverture des frontières, plusieurs milliers de migrants se sont dirigés vers la Grèce, réveillant en Europe le souvenir d'une crise migratoire ayant secoué le continent en 2015.
L'Union européenne a vivement dénoncé un «chantage» aux migrants au moment où Ankara réclame un appui occidental en Syrie, où la Turquie mène une opération militaire et est confrontée à un afflux de déplacés vers sa frontière. Alors que des milliers de migrants sont désormais bloqués à la frontière gréco-turque, des campements de fortune se sont formés du côté turc.
De nombreux migrants dorment à l'air libre malgré le froid. Les plus chanceux, souvent des familles avec enfants, ont confectionné des tentes avec des bâches, dont ils émergent chaque matin le visage exténué.
Exploités
Certains d'entre eux exprimaient vendredi leur frustration croissante contre Ankara, estimant avoir été dupés par des autorités turques leur ayant fait croire qu'ils pourraient aisément franchir la frontière.
«On nous a dit: Soit vous traversez illégalement, soit vous partez d'ici . Mais nous ne sommes pas venus pour franchir la frontière illégalement», dit à l'AFP Sina, un Iranien. «Nous sommes ici parce que la Turquie nous a autorisés à venir».
Des autocars garés non loin du poste frontalier de Pazarkule proposaient vendredi d'emmener des migrants vers le fleuve Meriç (Evros, en grec), qui sépare la Turquie et la Grèce.
Toute un système d'exploitation des migrants s'est par ailleurs développé, des vendeurs ambulants turcs écoulant à des prix décuplés des bouteilles d'eau, de la nourriture ou du matériel pour fabriquer des abris.
Un homme vendait ainsi cinq mètres de film plastique étirable pour 200 livres turques (30 euros), contre quelques dizaines de livres dans le marché. Autour de lui, des migrants afghans, pakistanais ou d'autres nationalités se pressaient, billets à la main.
Accord de cessez-le-feu
Les nouveaux heurts interviennent au lendemain de la signature, à Moscou, d'un accord de cessez-le-feu dans la région d'Idlib (nord-ouest de la Syrie) entre Recep Tayyip Erdogan et le président russe Vladimir Poutine.
Un responsable de la présidence turque a déclaré à l'agence de presse étatique Anadolu que ce cessez-le-feu ne signifiait pas qu'Ankara allait fermer ses frontières avec l'Europe.
«Elle n'est pas ouverte»
Le chef de la diplomatie de l'UE a appelé vendredi les migrants et les réfugiés poussés à quitter la Turquie à ne pas se rendre à la frontière avec la Grèce: «Elle n'est pas ouverte», contrairement à ce qui leur est dit.
«Si quelqu'un vous dit que vous pouvez y aller parce que la frontière est ouverte et que vous pouvez aller librement en Grèce ou à Chypre, ce n'est pas vrai», déclaré Josep Borrell dans un message à l'adresse des migrants après une réunion des ministres européens des affaires étrangères à Zagreb. «Evitez une situation dans laquelle vous pourriez être en danger. Evitez une escalade de la crise. Évitez de vous déplacer vers une porte fermée et ne dites pas aux gens qu'ils peuvent y aller parce que ce n'est pas vrai», a-t-il insisté.