Népal«On ne pourra bientôt plus grimper sur l'Everest»
Le sherpa le plus célèbre redoute que le réchauffement climatique ne rende bientôt l'escalade du Toit du Monde impossible.
- par
- Laszlo Molnar

Apa Sherpa (ici en mai 2010) a vaincu 21 fois l'Everest.
Apa Sherpa se dit bouleversé par les changements climatiques qu'il constate sur le Toit du Monde. «Les flancs du mont Everest manquent de neige», a déclaré au Himalayan Times ce Népalais considéré comme le sherpa plus célèbre en vie. «Quand j'ai escaladé pour la première fois cette montagne en 1989, la neige et la glace recouvraient tout au-delà de 5000?m d'altitude. Maintenant, par endroits, on marche sur de la roche.» Selon Apa Sherpa – le seul homme à avoir grimpé 21?fois au sommet de l'Everest – cette fonte de la glace est due au réchauffement climatique. «Un phénomène qui devrait d'ailleurs s'accentuer ces prochaines années à en croire les scientifiques. Et, si leurs prédictions sont exactes, il sera bientôt impossible d'escalader cette montagne.»
Glissements de terrain
Pour cet expert, les risques encourus par les alpinistes seront trop grands. La solidité du sol himalayen en altitude est liée au permafrost. Concrètement, en restant gelé en permanence, le sol assure la stabilité des rochers qui forment la pente de la montagne. «Mais, en dégelant, la terre se ramollit et les gros blocs peuvent se détacher, ce qui devrait entraîner des chutes de pierres et des glissements de terrain», explique un autre sherpa, Dawa Steven. En outre, «il est beaucoup plus difficile de marcher et de grimper sur des pierres humides et glissantes que sur de la glace», ajoute Apa. Les crampons pénètrent dans la glace ou un sol gelé. En revanche, ils glissent sur la roche, à moins de les enfoncer à coups de maillet. «Je ne peux que spéculer sur l'avenir. Mais mon expérience de la montagne me fait craindre le pire», a conclu le sherpa.
Concernant le réchauffement, les scientifiques s'attendent d'ailleurs aussi au pire. Ils estiment cependant que la fonte des glaciers des montagnes d'Asie est nettement moindre que dans d'autres régions du monde en raison de l'altitude du massif de l'Himalaya, selon un article qui vient d'être publié dans Nature. Mais un phénomène particulier a été constaté sur l'Everest, rapporte l'Agence Science Presse. La suie émise par le charbon et le bois utilisés par les Indiens et les Népalais pour la cuisine et le chauffage contribue à la fonte des glaciers davantage que la pollution due à l'industrie du côté sino-tibétain. Cette suie, du fait de sa couleur, absorbe la chaleur du soleil et réchauffe l'atmosphère. Quand elle se dépose sur la surface des glaciers, elle fait fondre la glace en dessous. La fonte serait donc plus accentuée sur la façade sud du Toit du Monde qu'au nord.