CyclismeParis-Roubaix - Il y a vingt ans, Duclos-Lassalle... (ENCADRE)
Gilbert Duclos-Lassalle, le doyen des vainqueurs de Paris-Roubaix, est âgé de 38 ans et 8 mois quand il se présente en chasse d'un deuxième succès, voici vingt ans, au départ de l'édition 1993.
"Tout avait mal commencé", se souvient le Français, déjà tracassé par des ennuis techniques avant la course (selle cassée, fourche récalcitrante). Un an plus tôt, il a touché le gros lot, à sa 14e tentative. Il a attaqué à 46 kilomètres de l'arrivée et gagné haut la main. Rien de tel cette fois. "A la sortie de la première portion pavée, je suis victime d'une crevaison et d'une chute". Le Béarnais ne peut saisir la roue de dépannage qui lui est lancée. Un autre coureur roule dessus et l'écrase. Ce n'est qu'au ravitaillement de Solesmes que le coureur de la formation Gan recolle au peloton, en compagnie de ses coéquipiers Philippe Casado et Greg LeMond. La deuxième alerte sonne quand Ballerini entraîne l'ensemble des favoris (Museeuw, Ludwig, Cipollini, Van der Poel, Sergeant) du côté de Quérenaing. Il ne manque que Duclos ! Piégé, "Gibus" a la bonne fortune de prendre le sillage d'une locomotive, le Belge Edwig Van Hooydonck, et de rentrer grâce à un ralentissement du groupe de tête. Une fois devant, il se fixe Ballerini pour repère. Quand le Toscan accélère à 30 kilomètres de l'arrivée, Duclos saute dans sa roue. Plus personne ne reverra le duo. Dans son autobiographie (Au coeur de la course), le futur vainqueur raconte son duel: "Il semble si facile qu'il me fait presque pitié. Je me revois en lui, dix ans auparavant. Je courais comme lui, bêtement". Le chasseur des Pyrénées-Atlantiques va prendre son rival au piège. Ballerini lui demande un relais. "Je voudrais bien mais je ne peux pas, répond-il. Je n'ai plus la force, Franco, tu le vois bien". Dans les dix derniers kilomètres, Patrick Lefevere, directeur sportif du Toscan, se méfie. Il demande à son coureur d'éviter le risque d'un sprint face à Duclos, habitué des les Six-Jours. Trop tard. Sur la piste, l'Italien est le plus fort physiquement, le Français le plus habile. Duclos reste à la corde, Ballerini remonte vers la tribune. Sur le moment, le juge d'arrivée et le speaker désignent "Ballero" qui, sûr de son fait, a levé les bras. Duclos, les larmes aux yeux, fait encore un tour en roue libre. Plusieurs minutes s'écoulent. Puis, il entend le résultat qui le désigne vainqueur, pour 8 centimètres d'écart. Son fils, Hervé, futur coureur professionnel, pleure, sa fille Magalie aussi, puis sa femme. C'est toute la famille Duclos-Lassalle qui monte sur le podium. Accablé, Ballerini affirme qu'il ne reviendra plus. Mais, deux ans plus tard, il s'imposera dans ce qui sera la dernière participation de Duclos-Lassalle, aujourd'hui chargé des relations publiques pour ASO, organisateur de Paris-Roubaix. jm/sk