Sion 2026Parmelin «optimiste» malgré un timing serré
Le conseiller fédéral reconnaît que le timing lié au système politique suisse n'est pas optimal pour les JO en Valais.
Guy Parmelin, assisterez-vous aux JO de Pyeongchang, et pensez-vous que les résultats des Suisses pourront avoir une influence sur le projet Sion 2026?
«Je serai à Pyeongchang du 21 au 26 février. De très bons résultats de la part des Suisses peuvent toujours créer une motivation et inspirer une nouvelle génération de sportifs. Concernant Sion 2026, c'est jouable. Il s'agit d'un bon projet, avec des risques financiers maîtrisés et des conditions très strictes posées par la Confédération, par exemple en terme de 'durabilité', d'héritage pour les générations futures. Ce n'est pas gagné, il faudra notamment encore convaincre le Parlement fédéral. Mais le Conseil fédéral est prêt à aller défendre le dossier devant le CIO.»
Comment entrevoyez-vous les votations à venir, en Valais d'abord (en juin) puis devant les Chambres fédérales?
«Je suis positif. Jusqu'à présent, nous avons surtout entendu les opposants. Il faut maintenant que tout le monde s'engage, les sportifs, la population... Il est normal que les gens se montrent critiques, notamment vis-à-vis de l'ancienne version du CIO. Mais les temps changent, on a vu par exemple que des mesures ont été prises contre les Russes en matière de dopage. En Suisse, le peuple entretient un rapport ambivalent vis-à-vis de l'organisation de grands projets. D'un côté, on demande aux politiciens d'en susciter, mais de l'autre, on trouve toujours 1001 raisons de dire non. Mais si la Suisse, un des pays les plus riches du monde, ne peut pas prendre le risque d'organiser des Jeux d'hiver, aucun autre pays ne va y arriver.»
Pensez-vous qu'il sera plus difficile de convaincre le peuple valaisan ou les Chambres fédérales?
«Joker! Une chose est certaine, si le Valais dit non en juin, tout s'arrête. Si c'est oui, il y aura ensuite les débats au Parlement fédéral. Il est aussi possible, suivant les cas, qu'il doive également y avoir d'autres consultations populaires, au plan local, ou éventuellement au plan cantonal, par exemple à Berne, mais a priori pas dans les cantons de Vaud et de Fribourg. Ces éventuels autres scrutins devront se tenir au plus tard jusqu'au 25 novembre prochain. Or, à ce moment-là, on ne connaîtra pas encore le vote de la deuxième Chambre appelée à se prononcer au plan fédéral. Elle ne votera en effet qu'en décembre 2018. Ce calendrier échelonné constitue un petit handicap pour le projet. En tout cas, tout devra être bouclé pour le 11 janvier, date du dépôt des candidatures auprès du CIO. Si tout n'est pas réglé d'ici là, autant aller se coucher! En attendant, c'est un dossier très émotionnel, et c'est à nous de répondre aux inquiétudes.»
Votre cahier des charges à la tête du DDPS est large, mais plus spécifiquement, en quoi consiste votre engagement pour le sport?
«Nous devons sans cesse expliquer, aux fédérations sportives par exemple, le rôle de la Confédération. Il y a pas mal de pédagogie à faire, le monde sportif n'est pas toujours au courant du fonctionnement de la politique. En Suisse, pour le sport, l'Etat pose le cadre, met à disposition les infrastructures, comme les centres sportifs de Tenero et de Macolin, qui profitent non seulement aux sportifs d'élite, mais aussi au grand public car ils sont ouverts. Je ne suis pas certain que la France par exemple, avec son modèle hypercentralisé d'aide aux athlètes, obtienne de meilleures performances sportives que la Suisse. Chez nous, une bonne partie du Parlement estime que le sport est d'abord une affaire privée. Toutefois, la Confédération soutient le sport au travers de trois piliers: le programme d'investissements dans les infrastructures, le soutien aux fédérations sportives via Swiss Olympic notamment, mais aussi le programme Jeunesse et Sport, qui est le meilleur promoteur de santé qui soit pour les jeunes de 5 à 20 ans. Nous y consacrons toujours plus d'argent: 115 millions de francs sont prévus pour 2020, contre 104 millions l'an dernier et 96 millions en 2016. Plus d'un demi-million de jeunes en profitent.»
La Confédération en fait-elle assez pour le sport d'élite?
«On peut toujours faire mieux. Mais si nous versons plus d'argent, il faudra économiser ailleurs. En outre, cela susciterait des convoitises d'autres catégories de la population. Le mieux est d'assouplir le cadre. Nous menons des réflexions, avec le monde sportif, pour mieux répondre aux besoins des sportifs d'élite une fois leur carrière terminée, par exemple via une flexibilisation en leur faveur du modèle du 2e pilier. Beaucoup d'athlètes d'élite se retrouvent en grande difficulté financière après leur carrière. Une autre piste pourrait être d'élargir le programme qui associe l'armée et les sportifs d'élite, en permettant à un plus grand nombre d'y accéder et donc d'être en partie rémunérés par l'armée.»
Le Parlement fédéral semble aujourd'hui plus enclin qu'autrefois à soutenir le sport, partagez-vous cette observation?
«Une chose est sûre, dès qu'il s'agit de voter des crédits pour des infrastructures en rapport avec le sport, les clivages traditionnels entre partis disparaissent. Toutes les couleurs politiques se mélangent. La Confédération, dans le cadre de son aide aux grandes manifestations, a décidé de soutenir financièrement trois importants projets, à hauteur d'une vingtaine de millions de francs. A savoir les Jeux olympiques de la jeunesse à Lausanne en 2020 (8 millions), le Championnat du monde de hockey sur glace à Zurich et Lausanne en 2020 (500'000 francs) et les Universiades d'hiver en 2021 dans la région de Lucerne (13 millions). A cela s'ajoute un crédit de 6 millions pour la patinoire de Malley. Par ailleurs, les Chambres ont décidé d'augmenter de 15 millions de francs la manne annuelle versée aux Fédérations pour soutenir la relève et le sport d'élite. C'est toujours un délicat équilibre à trouver: en Suisse, nous sommes fiers de nos sportifs d'élite, mais quand il s'agit de les aider, c'est une autre affaire...»