PolitiquePeut-on offrir des fleurs à une politicienne?
Vladimir Poutine a déclenché une polémique en offrant des fleurs à Angela Merkel. Un geste taxé de provocation sexiste. Chez les élues suisses, les avis sont partagés.
- par
- Meline Schröter
Le premier contact entre chefs d'État est toujours délicat entre ceux qu'il ne faut pas embrasser, ceux qui ne peuvent s'empêcher de secouer la main ou de toucher l'épaule de leur homologue et autres décalages culturels et protocolaires. Dernière polémique en date en Allemagne, où la rencontre Angela Merkel-Vladimir Poutine en terres russes a déclenché la colère du journal «Bild».
Accueillant vendredi dernier la chancelière allemande à Sotchi pour évoquer un projet de gazoduc sous-marin, le président russe l'attendait sur le perron, un bouquet de fleurs à la main. Un geste qui peut sembler anodin voire courtois mais pas selon le quotidien allemand. «Bild» y voit en effet un véritable affront sexiste: «Les responsables politiques mondiaux se serrent la main et ne s'offrent pas des fleurs (…). En se comportant de la sorte, Vladimir Poutine a voulu souligner que la chancelière était une femme.»
Une lecture de la scène qui divise les femmes politiques romandes. Pour Isabelle Chevalley, conseillère nationale (Vert'lib/VD), la polémique n'a pas lieu d'être: «Je ne suis absolument pas choquée qu'une cheffe d'État reçoive un bouquet de fleurs. Pour moi en offrir à une femme politique est une marque d'attention.» Un avis plutôt partagé par Ada Marra (PS/VD), qui explique que lorsqu'elle était secrétaire générale du PS Vaud, elle ne faisait aucune différence de genre dans les cadeaux pour les intervenants. «Ça n'est pas sexiste, tout comme offrir des fleurs à un homme politique. J'en ai reçu, ainsi que des bouteilles de vin, des paniers garnis ou des bons de livres, et j'en ai offert à des hommes.»
Pour Lisa Mazzone (Les Verts/GE) en revanche, le passé du président russe tendrait à accréditer la thèse de «Bild»: «Que M. Poutine soit de tendance sexiste n'est pas nouveau! Il avait notamment déclaré, sur France 3, en 2017: «Je ne suis pas une femme, je n'ai pas de mauvais jours!» ou à propos de Hillary Clinton: «Pour une femme, cependant, la faiblesse n'est pas tellement un défaut.» Il a une conception du monde profondément sexiste, pétrie de stéréotypes. Je trouve ce cadeau pathétique et déplacé et montrant fort bien sa conception des rôles hommes/femmes. Dans notre activité politique, ce qui est terrible, c'est quand on reçoit des fleurs et nos homologues masculins des bouteilles de vin! Oui, c'est sexiste. Certains ont compris que c'était inapproprié et nous offrent désormais vin et fleurs.»
Reste que la polémique a fait du bruit jusqu'au Kremlin, qui s'est fendu d'un communiqué pour justifier un acte «de galanterie et de politesse».