Russie: Près de 3’500 opposants russes mobilisés pour Navalny arrêtés

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RussiePrès de 3’500 opposants russes mobilisés pour Navalny arrêtés

L’appel à manifester lancé par le dissident Alexeï Navalny a été entendu et réprimé. Dimanche, le Kremlin a accusé les Etats-Unis d’«ingérence», suite à un communiqué publié à la veille des protestations.

Moscou, 23 janvier 2021.

Moscou, 23 janvier 2021.

AFP

Près de 3’500 manifestants au total ont été arrêtés lors des manifestations en Russie à l’appel de l’opposant Alexeï Navalny pour exiger sa libération, a rapporté dimanche l’organisation non gouvernementale OVD Info.

Des heurts se sont produits samedi entre police et manifestants dans plusieurs grandes villes alors que des dizaines de milliers de personnes se sont rassemblées à travers le pays, scandant «Poutine voleur!», Navalny, on est avec toi !» ou encore «Liberté pour les prisonniers politiques !».

À Saint-Pétersbourg, deuxième ville du pays et patrie du président Vladimir Poutine, une manifestante blessée se trouve en soins intensifs, a appris l’AFP dimanche de source hospitalière.

Selon OVD Info, spécialisée dans le suivi des manifestations de l’opposition, la police a arrêté au moins 3324 manifestants durant les rassemblements qui se sont déroulés dans des dizaines de villes, dont 1’360 personnes arrêtées à Moscou et 523 à Saint-Pétersbourg. Il s’agit du plus grand nombre d’arrestations durant des manifestations de l’opposition enregistrées dans l’histoire de la Russie moderne.

Selon le président du Conseil consultatif pour les droits de l’Homme auprès du Kremlin, Valéri Fadeïev, la plupart des manifestants arrêtés à Moscou ont été relâchés. Il a par ailleurs défendu, dans un communiqué, ces arrestations survenues lors des manifestations «illégales».

Les Etats-Unis et l’Union européenne avaient condamné la répression des manifestations de samedi. Amnesty International a pour sa part accusé la police d’avoir «battu sans discernement et arrêté arbitrairement» des manifestants.

Violences des deux côtés

Le Comité d’enquête russe, chargé des principales investigations criminelles dans le pays, a annoncé samedi soir l’ouverture d’une enquête sur un recours à des violences contre les forces de l’ordre et hooliganisme lors des manifestations pro-Navalny. L’antenne locale du Comité à Saint-Pétersbourg a annoncé dans un communiqué séparé l’arrestation d’un manifestant de 36 ans, soupçonné d’avoir frappé à coups de poing deux policiers en marge de la manifestation de protestation

Samedi soir, pour sa part, le parquet de Saint-Pétersbourg a indiqué enquêter sur des violences, y compris «de la part des forces chargées de faire respecter la loi». Le parquet a publié son communiqué après la diffusion par les médias locaux d’une vidéo montrant une femme tomber au sol après avoir été frappée à coups de pied par des policiers anti-émeutes.

La femme, identifiée comme Margarita Ioudina, demande dans la vidéo à trois policiers pourquoi ils arrêtent un jeune manifestant sans armes. L’un des policiers lui envoie alors un coup de pied au ventre. Il s’agit possiblement de cette altercation-là.

Margarita Ioudina a été hospitalisée samedi soir, blessée à la tête, a indiqué dimanche à l’AFP un représentant de l’hôpital Djanelidze à Saint-Pétersbourg. «Elle est dans un état grave», a déclaré ce responsable, «elle est en soins intensifs».

A coups de matraque

À Moscou samedi soir, des centaines de personnes ont rallié la prison de Matrosskaïa Tichina où est détenu Alexeï Navalny, dans le Nord de la capitale. La police y a procédé à des arrestations, frappant des manifestants avec des matraques et les dispersant.

Placé en détention provisoire et visé par plusieurs procédures judiciaires, Alexeï Navalny, 44 ans, a été appréhendé le 17 janvier, dès son retour d’Allemagne, après cinq mois de convalescence à la suite d’un empoisonnement présumé dont il accuse le Kremlin.

Son appel à manifester a été accompagné d’une enquête vidéo, visionnée plus de 70 millions de fois depuis mardi sur YouTube, dans laquelle il accuse Vladimir Poutine de s’être fait bâtir pour un milliard d’euros une fastueuse demeure privée au bord de la mer Noire. Un résumé de cette enquête réalisé par le média public allemand Deutsche Welle peut être visionné ci-dessous:

Les autorités rejettent l’ensemble des accusations d’empoisonnement et de corruption, qualifiant l’opposant et son entourage «d’escrocs».

Les Etats-Unis accusés d’«ingérence»

Le Kremlin a accusé dimanche les Etats-Unis d’ «ingérence», en dénonçant un communiqué de l’ambassade américaine à Moscou publié à la veille des manifestations de protestation en Russie pour exiger la libération de l'opposant Alexeï Navalny.

La représentation diplomatique américaine avait appelé sur son site les Américains à ne pas se rendre à ces rassemblements samedi, précisant les lieux où ils se déroulaient.

«Ingérence absolue»

Ces publications «constituent indirectement une ingérence absolue dans nos affaires intérieures», a réagi dimanche le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, dans une interview à la chaîne publique russe Rossia 1, dont des extraits ont été publiés sur le site de la chaîne.

«Indirectement, cela constitue un soutien direct à l’infraction de la loi de la Fédération de Russie via le soutien des actions non autorisées», a estimé Dmitri Peskov.

Si l’ambassade de Russie aux Etats-Unis avait agi de la même manière lors des troubles sur le territoire américain, «cela aurait sûrement provoqué une sorte de malaise à Washington», a-t-il ajouté.

Le ministère russe des Affaires étrangères avait déjà dénoncé le comportement de l’ambassade, dans un communiqué, en précisant que sa direction serait convoquée pour une «conversation sérieuse».

Les Etats-Unis avaient «condamné fermement l’emploi de méthodes brutales contre les manifestants et les journalistes» lors des manifestations de samedi, dans un communiqué la nouvelle administration du président Joe Biden.

(AFPE)

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