Football«Pourquoi un miracle pour Xamax et pas pour Sion ou Thoune?»
Tout le monde écrit qu’il faudrait un miracle pour sauver Neuchâtel Xamax de la relégation. Discussion avec Denis Müller, théologien et éthicien qui nous expose sa vision de l’exploit sportif et de la situation.

- par
- Thibaud Oberli

Le théologien et éthicien neuchâtelois était fan du FC Cantonal, qui a fusionné en 1970 avec le FC Xamax, après avoir été son rival.
Fan de ballon, connaisseur du football neuchâtelois depuis longtemps, parler de la relégation de Neuchâtel Xamax, qui affronte Servette dimanche (16h), est un crève-cœur pour le professeur de théologie et d’éthique Denis Müller. Si les amateurs de football ainsi que les médias piochent allègrement dans le vocabulaire de la religion pour évoquer l’exploit que représenterait le maintien, le pasteur protestant s’en tient strictement aux performances sportives.
Denis Müller, y aura-t-il plus de monde dans les églises à Neuchâtel ce dimanche?
Votre question est pleine d’humour, fort heureusement; d’une part il n’y a pas de lien entre l’occupation des Églises et les matches de football, pas plus qu’il n’y en a directement entre le Covid-19 et la pratique religieuse dans le canton. Il n’y a pas non plus de lien entre l’évitement de la relégation et l’idée de miracle. Pourquoi un tel miracle bénéficierait-il davantage à Neuchâtel Xamax qu’au FC Sion ou à Thoune? Chaque équipe doit donner le meilleur d’elle-même, dans une compétition dont on savait dès le début qu’elle entraînerait une relégation et un barrage.
Le sauvetage de Neuchâtel Xamax à Aarau était-il un miracle?
Vous aurez compris que pour moi, comme théologien, les résultats sportifs n’ont rien à voir avec ce qui se rapporte au miracle, pas plus, par exemple, que les résultats des élections politiques. À Aarau, l’an dernier, grâce à Stéphane Henchoz et à Serey Dié notamment, Neuchâtel avait réussi l’exploit de renverser la vapeur. Aucunement un miracle, mais une authentique prouesse.
Pourquoi ces références à la religion quand il n’y a presque plus d’espoir?
Il y a longtemps que l’équipe neuchâteloise savait qu’elle risquait la relégation. Ce n’est pas en recourant tardivement à un miracle que la situation pourra changer. Cela dit, le sport de compétition est souvent associé à des faits et un vocabulaire religieux, ce qui tend à montrer les enjeux anthropologiques élevés du sport.
Est-ce qu’un coach peut être comparé à un pasteur ou un prêtre lorsqu’il fait passer son message?
Le coach doit entrer sur le terrain avec la détermination de gagner et sans spéculer sur un résultat nul ou négatif. Le pasteur ou le prêtre vise le déploiement de la foi, c’est sans doute une forme de victoire, mais pas au détriment de l’équipe adverse. Ou alors il faut dire que le religieux appelle à vaincre le mal ou le malin. Sur un terrain de football, l’équipe d’en face n’est pas un ennemi, mais seulement un adversaire. Et la relégation n’est pas une descente aux enfers, seulement le fait d’être provisoirement rétrogradé.
Vous qui êtes un supporter de toujours des Rouge et Noir, allez-vous prier pour eux?
Je suis un supporter de Neuchâtel et des bleus de Cantonal, plus que de Xamax, qui était notre adversaire quand j’étais enfant. Mais jamais je n’ai prié ni pour mon équipe, ni pour une autre. Je ne crois pas non plus que Dieu préfère une équipe plutôt qu’une autre, J’aimerais seulement qu’il aime le football, et je pense même avec reconnaissance qu’il nous en fait cadeau!