Espagne: Puigdemont ne sera pas devant le juge jeudi

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EspagnePuigdemont ne sera pas devant le juge jeudi

Selon l'avocat du président catalan, celui-ci a trop de risques de se faire arrêter s'il rentre au pays.

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La tension commence vraiment avec la «guerre des Faucheurs». Les paysans catalans se révoltent en 1640 contre le roi qui les écrase sous les taxes pour financer la guerre contre la France et tuent le vice-roi. Cet épisode constitue l'hymne national catalan.

La tension commence vraiment avec la «guerre des Faucheurs». Les paysans catalans se révoltent en 1640 contre le roi qui les écrase sous les taxes pour financer la guerre contre la France et tuent le vice-roi. Cet épisode constitue l'hymne national catalan.

Antoni Estruch i Bros, Els Segadors, 1907
Mais les choses se gâtent encore plus le 11 septembre 1714. Durant la guerre de succession d'Espagne, Barcelone choisit le camp des Habsbourg contre les Bourbon. Ceux-ci triomphent et leur roi, Felipe V, écrase la ville. Une chute commémorée via la fête nationale catalane.

Mais les choses se gâtent encore plus le 11 septembre 1714. Durant la guerre de succession d'Espagne, Barcelone choisit le camp des Habsbourg contre les Bourbon. Ceux-ci triomphent et leur roi, Felipe V, écrase la ville. Une chute commémorée via la fête nationale catalane.

L'Onze de Setembre de 1714 – d'Antoni Estruch i Br
Au 20e siècle, après la proclamation de la IIe République, la Catalogne obtient un statut d'autonomie qui ressuscite l'institution de la Généralité de Catalogne. Le 6 octobre 1934, une très éphémère république catalane est même proclamée.

Au 20e siècle, après la proclamation de la IIe République, la Catalogne obtient un statut d'autonomie qui ressuscite l'institution de la Généralité de Catalogne. Le 6 octobre 1934, une très éphémère république catalane est même proclamée.

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Le dirigeant indépendantiste catalan Carles Puigdemont, destitué et installé à Bruxelles, refuse de comparaître devant la justice espagnole qui a ouvert contre lui une enquête pour sédition et rébellion. Il demande à être interrogé depuis la Belgique, a déclaré mercredi son avocat à la télévision publique catalane.

Avec 13 de ses conseillers (ministres), M. Puigdemont est convoqué jeudi à partir de 10h00 par une juge d'instruction de l'Audience nationale à Madrid. Cette juridiction, spécialisée dans les dossiers complexes, pourrait décider de l'inculper si elle suit les réquisitions du ministère public.

«Il ne va pas à Madrid, et j'ai proposé qu'on l'interroge ici en Belgique. C'est possible, j'ai déjà eu dans le passé des cas comme ça, quand on a interrogé le suspect en Belgique», a déclaré l'avocat belge, Paul Bekaert, sur TV3.

Celui-ci avait déjà déclaré auparavant à la chaîne de télévision publique néerlandaise NOS qu'il ne croyait pas que M. Puigdemont, arrivé lundi à Bruxelles avec une partie de son gouvernement destitué, répondrait à cette convocation étant donné que «le risque est grand qu'il soit arrêté». «Je ne pense pas qu'il retournera en Espagne dans les semaines qui viennent», a-t-il ajouté dans un entretien à la chaîne belge flamande VTM.

Crainte d'un «désir de vengeance»

M. Puigdemont avait assuré mardi au cours d'une conférence de presse dans la capitale belge qu'il ne reviendrait pas en Espagne sans l'assurance de bénéficier d'un procès impartial. Il accuse le parquet de nourrir un «désir de vengeance» à son endroit. Au moins deux «ministres» partis à Bruxelles sont finalement repartis et ont atterri mardi soir à Barcelone, où des militants unionistes les ont accueillis aux cris de «traîtres».

Le procureur général de l'Etat requiert de poursuivre le dirigeant indépendantiste et ses «ministres» notamment pour sédition et rébellion. Ces chefs d'inculpation sont passibles de 15 et 30 ans de prison.

Il a requis les mêmes inculpations contre la présidente et les membres du bureau du parlement catalan. En raison de leur immunité parlementaire, ils doivent se présenter devant un juge d'instruction de la Cour suprême.

Risque de détention provisoire

M. Puigdemont et son cabinet risquent d'être placés en détention provisoire, comme deux présidents de mouvements associatifs indépendantistes écroués mi-octobre pour «sédition». Ils avaient appelé à une manifestation pendant laquelle des gardes civils avaient été empêchés de sortir d'un bâtiment et trois véhicules des forces de l'ordre endommagés.

S'ils ne répondaient pas à leur convocation, le parquet devrait demander leur arrestation. Pour ceux qui se trouvent à Bruxelles, l'Espagne devra délivrer un mandat d'arrêt européen.

«Fake news»

M. Puigdemont a fait savoir qu'il s'installait «au coeur des institutions européennes» pour «expliquer au monde les défaillances démocratiques de l'Etat espagnol».

L'ambassadrice d'Espagne en Suisse Aurora Diaz-Rato a qualifié le récit indépendantiste catalan de «fake news», construit autour d'un peuple qui n'existe pas. «Le seul souverain est le peuple espagnol», a-t-elle affirmé mercredi au 19:30 de la RTS.

«Guerre médiatique»

L'ancien journaliste «joue plus à capter l'attention médiatique qu'à échapper à la justice», a déclaré à Madrid le politologue Fernando Vallespin. «C'est une guerre médiatique, (son) récit a été d'essayer de présenter l'Etat espagnol comme un Etat oppresseur», selon lui.

A Barcelone, son collègue Oriol Bartomeus a vu lui aussi dans l'attitude de M. Puigdemont une stratégie électorale. «S'il ne se présente pas devant le juge, il deviendra un fugitif et cela pourra conduire le juge à décider sa mise en détention provisoire: or, un Puigdemont libre ne génère pas de retombées électorales mais un Puigdemont en prison, si», a-t-il estimé.

L'exil volontaire de M. Puigdemont et la reprise en main de la région par Madrid commencent à faire émerger les divisions dans le camp indépendantiste, déjà déchiré avant la crise entre partisans de la stratégie de rupture et défenseurs de négociations avec Madrid. Certains dirigeants sécessionnistes ont commencé à admettre l'échec de la proclamation d'indépendance et à échanger des reproches.

(afp/ats)

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