Votations: Schneider-Ammann: «Une initiative inacceptable»

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VotationsSchneider-Ammann: «Une initiative inacceptable»

Le ministre a lancé la campagne officielle contre le texte d'Uniterre qui réclame la souveraineté alimentaire en Suisse. Interview.

Christine Talos
Berne
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Christine Talos
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Après un comité d'agriculteurs qui a dit tout le mal qu'il pense des deux initiatives agricoles soumises au peuple le 23 septembre, c'était au tour mardi du Conseil fédéral d'entrer dans l'arène. Johann Schneider-Ammann s'en est pris à Uniterre qui réclame la souveraineté alimentaire en Suisse.

Le texte exige une agriculture écologique et diversifiée tournée vers la production locale, ainsi que des conditions de travail équitables. Il vise aussi à instaurer des barrières douanières pour les produits étrangers, voire une interdiction de l'importation de ceux non conformes aux normes sociales et environnementales suisses. Bien que l'initiative soit décriée par la plupart des partis, elle semble avoir le soutien de la population. Près de trois quarts des Suisses y sont favorables, selon des récents sondages. Ce qui inquiète le ministre de l'économie.

Redaktion Tamedia: Les sondages montrent que les citoyens sont à plus de 75% tentés par le texte d'Uniterre. Etes-vous inquiet?

Johann Schneider-Ammann: Oui je suis inquiet évidemment. C'est la raison pour laquelle il faut clarifier la situation et arriver avec des informations basées sur des faits et des chiffres. C'est une initiative qui porte un titre sympa et qui parle aux Suisses. Tout le monde veut depuis toujours le souveraineté. C'est ce que nous cherchons aussi dans le dossier européen. Mais la souveraineté dans le domaine alimentaire, ce n'est pas la bonne recette et c'est inacceptable. Il nous reste quelques semaines pour convaincre et faire descendre le «oui» sous la barre des 50%.

Mais les sondages montrent que les Suisses souhaitent peut-être une agriculture différente, tournée vers le développement durable. Que leur répondez-vous?

Il nous faut tous, administration, politiciens, agriculteurs, associations de paysans, arriver avec des arguments réels, corrects, complets. Pas seulement avec des mots sympas. Cette initiative demande que l'Etat crée plus de paysans, plus d'exploitations agricoles. C'est contre notre politique de ces 20-30 dernières années. La conséquence sera de perdre notre compétitivité. Cela augmentera en outre les coûts de l'agriculture en général et les prix de nos aliments. Et les consommateurs suisses auront moins de choix. On ne peut donc pas accepter un tel développement.

Le texte d'Uniterre prône le renforcement des structures régionales à taille humaine qui produisent des denrées locales, seul moyen d'enrayer l'exode rural et le chômage à la campagne. Or les Suisses s'inquiètent de ces fermetures de fermes....

Il faut que nous adaptions l'agriculture et les exploitations selon le concept de notre économie en général. Et notre économie doit se défendre contre l'internationalité. Je vous rappelle que nous gagnons chaque 2e franc suisse à l'étranger. Cela dit, avec un taux de 2,5% par année de restructuration dans le monde agricole, nous restons encore dans une dimension sociale. C'est pourquoi nous essayons de mener les restructurations et l'agriculture du futur de manière à ne pas provoquer de chocs, tout en arrivant à obtenir des structures plus efficaces et plus compétitives.

Mais justement, les paysans ne se battent pas à armes égales avec l'étranger et Uniterre estime que l'agriculture suisse est sacrifiée sur l'autel du marché mondial...

C'est un combat quotidien. Il y a toujours deux offres en Suisse, les produits indigènes et les produits de l'étranger. Et en tant que consommateur, nous avons la chance de pouvoir décider ce que nous achetons selon nos critères. Or le critère le plus important, c'est le prix. C'est pour cela qu'il faut réduire les coûts chez nous, mais d'une manière sociale, pour pouvoir vendre nos produits sur les marchés et défendre les positions de nos paysans.

Les Suisses votent encore le 23 septembre sur une autre initiative agricole, celle des Verts, qui réclame des aliments équitables en Suisse. C'est Alain Berset qui a défendu la position du Conseil fédéral avant les vacances déjà. Pourquoi n'avoir pas fait campagne commune?

Nous venons relativement tard sur le texte d'Uniterre, mais nous venons avec un concept concerté avec les opposants, dont Economiesuisse et les associations faîtières qui se prononceront ces prochains jours. Cela poussera ainsi les consommateurs à s'intéresser à ce thème. Et s'ils se penchent sur cette initiative, ils verront qu'elle est inacceptable.

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