Au coeur du scandale des «caisses noires» de l'Union chrétienne-démocrate (CDU) qui avait propulsé Angela Merkel à la tête du parti, le marchand d'armes germano-canadien Karl-Heinz Schreiber a été condamné jeudi à six ans et demi de prison pour fraude fiscale.

Cet homme de 79 ans purgera sa peine à son domicile, a précisé un porte-parole du tribunal d'Augsbourg, en Bavière. Karl-Heinz Schreiber avait été libéré sous caution pour raisons médicales en mai 2012, après une crise cardiaque.

Karl-Heinz Schreiber avait déjà été condamné par ce même tribunal à huit ans de prison en mai 2010 pour une fraude fiscale de 7,5 millions d'euros. Mais le jugement avait été cassé par la Cour fédérale de justice allemande, qui avait demandé une nouvelle instruction et un nouveau procès.

La Cour fédérale avait notamment exigé que les enquêteurs vérifient si M. Schreiber résidait bien principalement en Allemagne entre 1988 et 1993, ou au Canada, comme il l'affirmait, auquel cas il dépendait du fisc canadien.

Le tribunal d'Augsbourg a confirmé jeudi que des charges de corruption ne pouvaient être retenues contre M. Schreiber en raison de la prescription des faits.

Extradé du Canada en 2009, Schreiber avait déjà été relaxé, lors du premier procès, du chef d'accusation selon lequel il avait cherché à soudoyer un ancien secrétaire d'Etat à l'Armement du gouvernement d'Helmut Kohl, Ludwig-Holger Pfahls (CDU).

Il est en revanche reconnu coupable de ne pas avoir déclaré au fisc 33,1 millions d'euros de commissions encaissées dans le cadre de ventes internationales d'armes (des blindés Fuchs à l'Arabie saoudite, des hélicoptères au Canada et des avions à la Thaïlande). Il avait gardé une partie de l'argent et distribué le reste à des tiers, issus notamment des milieux politique et économique.

Le scandale des caisses noires avait éclaté quand M. Schreiber avait avoué un «don» d'un million de marks (environ 750'000 francs) à la CDU en 1991 dans le cadre d'une vente de blindés à l'Arabie saoudite pendant la guerre du Golfe.

La remise de cet argent sur un parking en Suisse avait déclenché l'ensemble de l'affaire. M. Schreiber avait également ouvert des comptes à Zurich et disposait d'un domicile à Pontresina (GR).

La Confédération avait levé en 2008 l'interdiction signifiée à l'Allemagne d'utiliser des documents bancaires suisses dans le cadre du procès Schreiber. Auparavant, Berne et la justice allemande s'opposaient sur le droit de les utiliser dans le cadre d'une procédure d'entraide judicaire.

L'affaire avait précipité la chute politique du «chancelier de la Réunification» Helmut Kohl, déjà battu aux élections législatives de 1998, et permis l'ascension de l'actuelle chancelière Angela Merkel, élue à la tête de la CDU en 2000.

Le scandale avait aussi éclaboussé l'actuel ministre des Finances, Wolfgang Schäuble. Il avait été contraint de démissionner de la présidence du parti après avoir avoué qu'il avait reçu en liquide 100'000 marks.