FranceTensions autour de l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie
La campagne en vue du référendum sur l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie, qui se tiendra le 4 octobre prochain, a été lancée dans un climat tendu.

Le premier ministre français de l’époque Edouard Philippe avait tenu un discours à Nouméa en novembre 2018, le lendemain du «non» à indépendance.
Indépendantistes et loyalistes viennent de se lancer dans la campagne pour le deuxième référendum sur le maintien ou non de la Nouvelle-Calédonie dans la France, le 4 octobre prochain, dans un climat qui se radicalise et fait craindre des débordements.
Un premier référendum avait été organisé le 4 novembre 2018 et s’était conclu par la victoire du «non» à l’indépendance (56,7%) de ces îles sous souveraineté française depuis le XIXe siècle, situées dans le Pacifique et la mer de Corail et disposant aujourd’hui d’une large autonomie.
Dans le cadre du processus de décolonisation de l’accord de Nouméa (1998), un troisième scrutin peut avoir lieu d’ici à 2022 si le non l’emporte encore le 4 octobre.
Bâche incendiée
«La bipolarisation du paysage politique s’est considérablement cristallisée et le ton de la campagne est beaucoup plus offensif qu’en 2018», observe Pierre Christophe Pantz, docteur en géopolitique.
«Les postures se durcissent en 2020, nous devons appeler à l’apaisement car il suffit d’une allumette. La haine, la violence et l’exclusion sont des choix faciles», confirme Elie Poigoune, membre du Comité des Sages, chargé de veiller au déroulement apaisé de la campagne.
Le président local de la Ligue des droits de l'Homme avait fait cette déclaration après l’incendie, dans la nuit du 10 au 11 juillet, d’une immense bâche aux couleurs du drapeau français déroulée sur la façade de la province sud dirigée par la droite loyaliste pour le 14 juillet.
Tout en condamnant cette dégradation, M. Poigoune a aussi considéré ce pavoisement à moins de trois mois du référendum comme une «provocation» alors que les réseaux sociaux ont été inondés de messages racistes. L’auteur des faits, qui a revendiqué un acte politique, a été condamné à 12 mois de prison dont 6 avec sursis
Drapeau français autorisé dans la campagne
Les partis loyalistes ont rassemblé dimanche entre 5’000 et 8’000 personnes à Nouméa lors d’un grand pique-nique «Bleu Blanc Rouge», les couleurs du drapeau français.
«La volonté est de ne pas avoir honte de cette fierté d’être français», a expliqué Sonia Backès, présidente de la province Sud, satisfaite qu’en dérogation au code électoral, l’État a, contrairement à 2018, autorisé l’usage du drapeau tricolore pour la campagne officielle de septembre.
Une mesure qui hérisse, à l’inverse, le FLNKS (Front de libération nationale kanak socialiste), la coalition indépendantiste qui a même menacé de contester le résultat du référendum. Cette dernière, qui a donné le départ de sa campagne samedi dernier, a multiplié les prises de position radicales.
Défaite vue comme un succès
Stigmatisant notamment «un pillage des ressources naturelles», les indépendantistes ont menacé de «se mobiliser sur le terrain» pour s’opposer à la volonté de groupes miniers d’augmenter leurs exportations de minerai de nickel, soutenues par les loyalistes.
Alors que des discussions entre les trois signataires de l’accord de Nouméa (État, FLNKS, loyalistes) pour préparer «l’après référendum» s’étaient, non sans difficulté, tenues en 2018, celles-ci sont depuis interrompues.
Après les violences meurtrières entre «caldoches» d’origine européennes et indépendantistes kanak, qui avaient culminé avec la sanglante prise d’otages de la grotte d’Ouvéa (1988), la Nouvelle-Calédonie est engagée dans un processus de décolonisation négocié et progressif, inédit dans l’histoire française.
Le résultat du premier référendum, avec un score du «non» à l’indépendance bien inférieur à tous les pronostics, a été vécu comme une «déception» par les loyalistes, tandis que la défaite des indépendantistes a fait figure de succès.