cyclismeTour de France - La bordure, un art qui ne s'improvise pas (PAPIER D'ANGLE)
Par Benoît NOEL Zélande (Pays-Bas), 5 juil 2015 (AFP) - Les favoris piégés dans la deuxième étape du Tour de France dimanche en Zélande, les Nibali, Quintana et autre Pinot, se sont rappelés à leurs dépens que la bordure est un art qui ne s'improvise pas et nécessite habitude et préparation.
"Beaucoup d'équipes avaient choisi de reconnaître en long et en large l'étape des pavés mardi, alors que chez Lotto nous avons préféré reconnaître ce final en Zélande. Nous avons été bien inspirés", se félicitait dimanche le Français Tony Gallopin, équipier du vainqueur, l'Allemand André Greipel. Les coureurs étaient prévenus. Relief plat, végétation quasi absente lors des 40 derniers kilomètres, pluie et vent: tous les ingrédients étaient présents entre Utrecht et la Zélande pour créer des bordures, ce terme qui caractérise le morcellement du peloton en de multiples groupes sous l'effet des bourrasques. "Ca se joue à rien, il suffit de perdre deux ou trois longueurs sur le coureur qui vous précède et vous ne revoyez plus jamais l'avant de la course", pestait Thibaut Pinot, 3e du Tour-2014 et qui faisait partie des grands battus dimanche soir. Les coureurs des formations belges Etixx et Lotto étaient nombreux aux avant-postes dans le final. Les bordures (appelées aussi "éventails"), ces formations les maîtrisent à la perfection. Elles répètent leurs gammes dès le Tour du Qatar en début de saison dans le venteux désert de la région de Doha. "On s'est régalé aujourd'hui (dimanche), mais il nous a manqué la victoire", réagissait le Tchèque Zdenek Stybar qui, avec l'Allemand Tony Martin et le Polonais Michal Kwiatkowski, avait préparé le terrain pour le sprinteur Mark Cavendish en faisant s'étirer le peloton. A entendre Tony Gallopin, les Lotto avaient bien préparé leur coup: "Nous connaissions le final par coeur, notamment les changements de direction, les virages où nous pouvions accélérer". L'équipe belge avait aussi placé quelques membres de son encadrement devant le peloton pour informer en temps réel les coureurs sur le sens du vent. Chez Etixx, le directeur sportif Tom Steels s'était rendu il y a plusieurs semaines en Zélande afin de prendre certaines notes et filmer les endroits les plus critiques. Ensuite, c'est aux coureurs de jouer: accélérer au bon moment et produire un effort intense durant deux à trois kilomètre, afin d'étirer le peloton et finir par faire craquer les plus faibles, ce qui provoque inévitablement des cassures. Les coureurs piégés n'avaient pourtant pas l'excuse de la surprise puisque ces risques de bordures étaient annoncés depuis des semaines. "Ce qui nous a surpris, c'est davantage l'accumulation de ronds-points qui ont favorisé l'étirement du peloton et les premières cassures", a expliqué le Néerlandais Bauke Mollema, autre victime du jour. Après avoir perdu du temps samedi au contre-la-montre, le Colombien Nairo Quintana a laissé échapper près d'une minute trente dimanche. Déçu, l'un des grands favoris du Tour n'a pas daigné parler aux journalistes. Seul son équipier Alex Dowsett a traduit son sentiment: "Nairo est abattu. Je me demande si ce Tour est vraiment un Tour dessiné pour les grimpeurs, comme beaucoup le laissent entendre". L'étape de dimanche, en tout cas, n'était pas faite pour les allergiques aux éventails. bnl/bvo