CyclismeTour de France: on a aimé, on n’a pas aimé...
La Grande Boucle touche à sa fin. L’occasion de rembobiner un peu plus de trois semaines de pérégrinations autour d’une course pas comme les autres, encore plus en 2020.
- par
- Robin Carrel

Des images toujours plus colorées, même en automne. Ici, au départ de Sisteron.
On a aimé
Les Suisses
Ils n’étaient que quatre au départ (contre 39 Français, 17 Espagnols ou Belges, ainsi que 16 Italiens, par exemple), mais sur les trois semaines, on a vu du Suisse de partout. Marc Hirschi, forcément, le super-combatif du Tour et ses envols sur un peu tous les terrains, Stefan Küng et Sébastien Reichenbach, à l’attaque sur leur terrain respectif dès que Thibaut Pinot avait replié les ailes, et Michael Schär, en partance pour Ag2r et qui était à l’avant les dix premiers jours de course. Tous parlent français – même si Hirschi n’aime pas trop le faire en radio ou en télé –, tous sont sympas, tous ont des choses à dire... Un bonheur!

Marc Hirschi a réussi l’exploit de battre les Français pour le titre de super-combatif du Tour.
Le scénario final
On ne va pas vous mentir, en se déplacement à la salle de presse pour y suivre le contre-la-montre de la Planche-des-Belles-Filles, on avait déjà en tête l’article du lendemain. On ne va pas vous la faire à l’envers non plus, il était presque prêt, avec des appels à Sylvain Freiholz et Killian Peier, histoire de prendre les devants et d’essayer de comprendre quels avantages éventuels avait un ancien sauteur à skis posé sur une bicyclette. Et puis patatras. Les palpitations. L’incrédulité. L’hallucination. Ce gamin de 21 ans, frais comme un gardon et gentil comme tout, a joué les tueurs et a assassiné de sang-froid la concurrence, en commençant par son compatriote et ami Primoz Roglic. Fabuleux, stupéfiant, diront forcément certains.

Tadej Pogacar, fendant la foule.
La jeune génération
La nouvelle génération de cyclistes (Pogacar, bien sûr, mais aussi des Van Aert, Hirschi, Van der Poel, Evenepoel, Bernal aussi...) fait tourner les têtes et est en train de retourner le cyclisme tout entier. Tadej Pogacar a gagné le Tour parce qu’il attaque. Ses jeunes comparses n’hésitent pas non plus à tenter leur chance certaines fois de loin, souvent de très loin. Une façon de courir qui tranche avec les trains Sky/Ineos et Jumbo-Visma qu’on a souvent vu sur le Tour de France et dans les autres courses. Samedi, à la Planche-des-Belles-Filles, c’est un peu le vieux monde du vélo qui en a pris un nouveau coup et ce n’est pas pour nous déplaire.
Le Tour, tout simplement
La France, c’est beau, c’est grand, mais en tant que touristes, on a vite tendance à aller dans des endroits convenus, où sont allés nos parents ou alors où Tripadvisor, Google, voire même les photos Instagram de nos potes nous mènent. Or, il y a tant d’autres choses à voir et le Tour de France – qui est aussi et surtout le Tour de LA France comme dirait l’autre – nous permet de découvrir des endroits aussi magnifiques qu’insoupçonnés. Les Pyrénées, les alentours de Millau, le Grand Ouest, le Massif Central, j’en ai encore des étoiles dans les yeux. Rien que d’avoir réussi à organiser la course est aussi un exploit, là où l’Euro et les JO ont préféré repousser.

Même Poitiers, c’est joli!
Richie Porte!
Cela faisait des années qu'il essayait, mais on avait fini par croire que le Tour ne voulait pas de lui. Il est même passé par la Sky faire le super-équipier tant il commençait à douter. Des chutes, de la malchance, des abandons... Mais à 35 ans, l'Australien qui s'était révélé sur le Tour de Romandie lors d'un mémorable contre-la-montre à Moudon en 2010 où on avait tous cru à un problème de chronomètre, a fini par attraper son podium. Une troisième place qui vaut tous les maillots jaunes du monde pour lui. Il y a quand même une justice dans le vélo.

Enfin un sourire à la fin du Tour pour l’Australien.
On n’a pas aimé
Les mesures Covid, forcément
Ce n’est de la faute à personne – à part si l’on souhaite vraiment blâmer un pangolin ou une chauve-souris... voire un laboratoire chinois pour les plus conspirationnistes –, mais qu’est-ce le coronavirus a complexifié la tâche déjà pas simple de suivre la Grande Boucle. Un journaliste par pays, en gros, était toléré aux départs et aux arrivées et devait enregistrer son entretien avec le smartphone pendu au bout d’une perche à selfie. Pas de sympathique conférence de presse au bord d’une piscine les jours de repos, des masques partout dans les centres villes, dans la salle de presse, dans les transports. Le pire? Les arrivées à huis clos comme à Lyon.

Bulle course respectée à Lyon
Le tracé faisant la part belle au rugby
Quand on est féru de football, on regarde forcément attentivement le parcours du Tour dès sa conception pour voir où on pourra aller visiter un stade inconnu, acheter un maillot d’une équipe locale ou même profiter du voyage pour engranger une interview d’un Suisse expatrié dans le coin. Or, cette année, il aurait fallu compter sur un très éventuel Helvète rugbyman pour pouvoir garnir les colonnes de nos journaux! Pau, La Rochelle, Clermont... Autant de coin de France où l’Ovale est roi! Heureusement qu’il y avait Nice et Jordan Lotomba au programme pour le grand départ, sinon on aurait presque été déçu!

Le joli Stade du Hameau de Pau.
La SNCF
Quand on essaie de faire un Tour à peu près écoresponsable – il faut bien compenser – et qu’on fait marcher à fond les transports publics, on sait qu’on s’expose à de grosses désillusions, comme dirait Aimé Jacquet. Si on a pu être «déçus en bien» en début de Tour de France, ça n’a été que reculer pour mieux sauter en retard. Un retard cumulé de quelque six heures en trois déplacements pour essayer de traverser le pays met les nerfs à rude épreuve. Ça permet de rencontrer des gens très drôles, c’est vrai, parce que le fatalisme est une source immense de bonnes blagues.