BrutalUn faon coupé en deux par une machine agricole
Devant son refuge, l'amie des chats Tomi Tomek découvre la moitié d'un faon dans un champ. La faute aux faucheurs qui ne se sont pas préoccupés de sa présence.
- par
- Vincent Donzé

En soulevant du foin dans un champ en contrebas de son refuge, Tomi Tomek a trouvé samedi la moitié du faon qu'elle a photographié mercredi.
Un haut-le-cœur, c'est le sentiment qu'a éprouvé samedi, à Noiraigue (NE), Tomi Tomek, gérante du refuge SOS Chats. La militante de la cause animale, qui avait pris l'habitude d'observer une famille de chevreuils, a découvert le drame qui s'était noué la veille dans un champ: le faon qu'elle voyait, de sa fenêtre, bondir autour de sa mère a été coupé en deux par une faucheuse.
Attention particulière requise
L'incident s'est produit dans le port franc fédéral du Creux-du-Van, une réserve naturelle qui n'implique aucune contrainte pour les agriculteurs, mais une «attention particulière», selon l'expression de Christophe Noël, responsable cantonal de la Faune. «Les chevreuils nous connaissent: pour qu'ils bougent, il suffit de frapper des mains ou de crier. Mais l'employé agricole est venu couper l'herbe sans crier gare», déplore Tomi Tomek. La famille de l'agriculteur est désolée: «Nous aimons les animaux, mais repérer un faon, même à deux mètres, ce n'est pas si facile.» L'erreur commise, c'est d'avoir fauché de l'extérieur vers l'intérieur de la parcelle, ce qui constitue un piège pour les faons, les lièvres et les oiseaux nicheurs.
À l'École d'agriculture de Courtemelon (JU), Olivier Boillat connaît le problème du gibier en général, et des faons en particulier: «Les faucheuses rotatives coupent l'herbe à une hauteur de 3 à 5 cm, tandis que les faons y sont tapis à 8 ou 10 cm.» Olivier Boillat sait aussi qu'une chevrette apprend à son faon à ne bouger sous aucun prétexte. Les paysans jurassiens sont invités à appeler les gardes-faune «afin de participer aux actions de recherches des petits chevreuils avant la fauche des foins».
Lampes clignotantes
À Neuchâtel, le Service de la faune et la Chambre d'agriculture s'unissent pour les sensibiliser: «Nous passons la veille au soir avec des lampes clignotantes», indique Christophe Noël. Depuis l'an dernier, des répulsifs sont aussi utilisés.
Les drones équipés de caméras infrarouges sont une parade lourde et coûteuse: «En attendant le résultat des études scientifiques, la préférence cantonale va à des solutions légères utilisables par les agriculteurs».
Olivier Boillat en est convaincu: «La clé appartient aux paysans: à eux d'observer les chevrettes qui les mèneront à leurs petits.» Le reproche adressé par Tomi Tomek à son voisin, c'est la désinvolture affichée avant la fauche: «Toute notre équipe est observatrice: il suffisait ne nous consulter et nous aurions pu désigner le faon.» Au lieu de ça, la chevrette a retrouvé la moitié de son petit dans le foin, après le premier passage d'une faneuse.
En 2015, les machines agricoles ont tué 1406 chevreuils dans tout le pays. Dans le même temps, ils étaient 1739 à succomber à une mort naturelle et 8423 à périr sur la route. Mais ces chiffres ne disent pas tout: «Ces données ne reflètent que les faons qui ont été retrouvés», précise Nicolas Bourquin, biologiste à l'Office fédéral de l'environnement.