Cyclisme: Un Tour de Suisse, quand même

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CyclismeUn Tour de Suisse, quand même

La «boucle nationale» s'élance virtuellement ce mercredi. Le format ne convainc pas les cyclistes, mais fait plaisir aux téléspectateurs.

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Le Vaudois Robin Froidevaux à l'«entraînement».

Le Vaudois Robin Froidevaux à l'«entraînement».

Keystone

Le 5 avril dernier, en manque total de vélo, le public flamand s'est passionné pour le Tour des Flandres virtuel. Couru par treize coureurs depuis leur salon ou leur cave, le Monument du vélo disputé sur un home-trainer a rassemblé 600'000 téléspectateurs, soit 50% des gens qui étaient devant leur petit écran à ce moment-là, dans ce coin de Belgique! Des chiffres incroyables, qui ont motivé équipes et sponsors à remettre le couvert sur cinq jours, en attendant une éventuelle saison cycliste qui reprendrait, selon les calendriers les plus optimistes, au début du mois d'août.

Le Tour de Suisse, qui devait se disputer entre Frauenfeld le 1er juin et Andermatt le 8, a logiquement été annulé et laissé sa place au «Digital Swiss 5», qui s'élancera virtuellement mercredi d'Agarn et se bouclera dimanche à Disentis-Sedrun. Soit cinq étapes de respectivement 26,6, 46, 33,1, 36,8 et 36 kilomètres à parcourir depuis... la maison de chaque coureur. La difficulté sera au rendez-vous, puisque chaque athlète pédalera sur un home-trainer connecté qui simulera les 1191, 180, 1512, 444 et 950 mètres de dénivelé.

Mercredi, ils seront trois coureurs de chacune des vingt formations en lice à prendre le départ de cette épreuve d'un genre nouveau. Jamais une course par étapes n'avait, en effet, rassemblé un si grand nombre de professionnels. Les directeurs-sportifs des équipes devront choisir trois de leurs coureurs chaque jour. Le programme utilisé ne simule malheureusement pas le vent ou l'aspiration créée par le cycliste de devant et les athlètes devront donc prendre part à quelque chose qui ressemble à un immense contre-la-montre en peloton.

Ça fait mal aux jambes, le paysage n'est guère enthousiasmant, hormis l'écran d'ordinateur de chacun... Autant dire qu'ils ne sont pas beaucoup à se réjouir de l'exercice en lui-même «Parce qu'il n'est pas naturel pour un coureur cycliste. Ce n'est pas la même motivation que d'être dans la nature», corrobore Marcello Albasini, le sélectionneur de Swiss Cyling, qui n'aura pas vraiment le choix des armes, puisqu'il partagera nombre de ses ouailles avec leur employeur habituel. «Dans le vélo, on est des hommes d'extérieur! C'est quelque chose de nouveau et, tactiquement, c'est difficile d'imaginer quelque chose. On a peu très d'expérience dans le domaine.»

«Ça va durer quelque chose comme une heure seulement et ça va être une sorte de contre-la-montre d'intérieur, prévoit Silvan Dillier. A mon avis, c'est encore plus dur qu'une course normale. Le danger est de se mettre complètement dans le rouge et c'est presque normal. On va être à fond dès le départ. Est-ce que ce sera un succès ? J'espère bien que le public aimera nous voir souffrir sur des rouleaux, sinon... Mais honnêtement, ce n'est vraiment pas ce qu'on préfère, même si c'est un rendez-vous nouveau, spécial et un peu révolutionnaire. J'espère les gens vont apprécier.»

Si la course en elle-même est très différente de ce qu'on peut voir d'habitude sur les routes de France, de Navarre de Romandie et donc de Suisse, cela ne change pas grand-chose pour les sponsors qui, eux, sont ravis d'avoir droit à une rare exposition en ces temps de confinement à domicile. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si les télévisions se pressent au portillon pour diffuser l'événement. La RTS est au rendez-vous sous nos latitudes et les pays friands de bicyclette ne sont pas en reste: L'Equipe TV en France, Eleven Sports en Belgique, Pologne, Italie et au Portugal, la ZDF en Allemagne, NOS aux Pays-Bas, Flo Sports aux Etats-Unis et au Canada...

Ce Tour de Suisse virtuel se court une semaine avant les dates initialement prévues pour le Tour de Romandie, annulé comme quasiment l'ensemble du début de saison. Généralement, les coureurs y souffrent de conditions atmosphériques difficiles, mais ils regrettent tous la boucle romande quand même. Du coup, ce n'est mieux dans son salon? «Jamais de la vie! C'est incomparable», sourit Sébastien Reichenbach. «Une course réelle sous la pluie, c'est toujours bien mieux que sur rouleaux», ajoute Robin Froidevaux. Dommage tout de même que Richard Chassot n'ait pas pu reprogrammer son «TdR» au début du mois d'août, pour permettre au peloton de monté en puissance avant la Grande Boucle. Il aurait sans doute, pour une fois, évité la neige.

Robin Carrel

Les équipes participantes: Ag2r la Mondiale (France), Team Ineos (Grande-Bretagne), Swiss Cycling, Bahreïn McLaren, Bora-Hansgrohe (Allemagne), CCC Team (Pologne), Deceuninck-Quick Step (Belgique), EF Pro Cycling (Etats-Unis), Groupama-FDJ (France), Israël Start-up Nation, Lotto Soudal (Belgique), Mitchelton-Scott (Australie), Movistar Team (Espagne), NTT Pro Cycling (Etats-Unis), Rally Cycling (Etats-Unis), Team Jumbo-Visma (Pays-Bas), Sunweb (Allemagne), Total Direct Energie (France), Trek-Segafredo (Etats-Unis).

L'équipe de Suisse: Michael Albasini, Matteo Badilatti, Stefan Bissegger, Filippo Colombo, Silvan Dillier, Matthias Frank, Robin Froidevaux, Claudio Imhof, Stefan Küng, Fabian Lienhard, Sébastian Reichenbach, Michael Schär et Nino Schurter.

Les principales têtes d'affiche: Romain Bardet (Ag2r), Wout Poels (Bahreïn), Greg van Avermaet, Ilnur Zakarin (CCC), Julian Alaphilippe, Remco Evenepoel (Deceuninck), Adam Yates (Mitchelton), Victor Campenaerts (NTT), Primoz Roglic (Jumbo), Rohan Dennis, Michal Kwiatkowski (Ineos), Michael Matthews (Sunweb) et Vincenzo Nibali (Trek).

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