Voyages: Une chance sur deux de croiser son voisin

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VoyagesUne chance sur deux de croiser son voisin

Le fait de tomber sur une connaissance lors d'un déplacement à l'étranger peut sembler extraordinaire. C'est pourtant chose commune. Comment l'explique-t-on?

Yann Marguet
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Trois cent soixante mille personnes se croisent chaque jour sur les trottoirs de Times Square, à New York. Comme beaucoup, vous n'y passerez que quelques fois au cours de votre existence. Pourtant, l'été dernier, vous y avez rencontré votre voisin de palier totalement par hasard. Souvent interprété comme des signes du destin, ce type de coïncidences est pourtant arrivé à chacun d'entre nous. Comment un événement si extraordinaire peut-il être, au fond, si ordinaire? «Parce que c'est en fait relativement probable» explique Henri-Arnaud Thévenet, sociologue spécialisé dans les réseaux. Le scientifique nous propose même une estimation rapide en considérant la période de l'année et l'attrait touristique de la destination. «Si l'on étend le calcul à 300 personnes, ce qui constitue le réseau moyen d'un individu, il peut y avoir plus d'une chance sur deux qu'une connaissance se trouve dans la même ville que nous.» Une probabilité déjà élevée qui augmente dans les points les plus touristiques du lieu, pour peu que vous y arriviez le même jour et y passiez le même temps. «Imaginons que vous y restiez sept jours avec une visite par demi-journée. Vous aurez une chance sur quatorze que cette personne choisisse la même activité que vous.»

Comme à la loterie

Stephan Morgenthaler, professeur de statistiques à l'EPFL, nous explique pourquoi, malgré leur régularité certaine, ces coïncidences nous surprennent tant. «Si un événement a une chance sur un million de se produire, il se produira malgré sa faible probabilité. C'est parce qu'il vous arrive à vous que vous n'y croyez pas.» L'exemple du loto permet d'en prendre conscience. Alors qu'il vous paraîtra hautement improbable, à vous, lecteur, d'empocher la prochaine cagnotte de l'EuroMillions, le fait qu'une personne autre que vous en soit l'heureux gagnant ne vous étonnera guère. «Avec toutes les choses qui se passent, il est forcé que certaines d'entre elles vous arrivent une fois ou l'autre.»

Tout ne serait alors que mathématiques? Pas de manifestations du destin, pas de force spirituelle supérieure, pas de symbolique divine? Sans avoir obtenu de réponse finale, le célèbre psychiatre suisse Carl Gustav Jung développa le concept de «synchronicité». Kaj Noschis, psychanalyste jungien, nous l'explique. «Il avait cette idée qu'il existe quelque chose qui va au-delà de notre perception immédiate des événements.» Une forme d'inconscient collectif. «Nous partageons quelque chose de commun qui nous connecte entre tous. Nous sommes en contact.» Un lien culturel ou spirituel qui nous guiderait aux mêmes endroits aux mêmes moments. Même s'il n'en a formulé que l'hypothèse sans vraiment la tester, Jung cherchait à faire admettre à notre culture que tout n'est pas explicable par une logique causale, que si le hasard fait bien des choses, il ne les fait pas toutes.

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