Suisse: Une combinaison simule les effets de l'âge

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SuisseUne combinaison simule les effets de l'âge

Comment rendre sensible le personnel soignant à la problématique du vieillissement? Par un costume spécifique.

Cette combinaison rend compte des problèmes rencontrés par les personnes âgées.

Cette combinaison rend compte des problèmes rencontrés par les personnes âgées.

Cura Viva, Keystone

Devenir vieux en quelques minutes est possible. CuraViva propose aux EMS de tester le costume «AgeMan». Le but: rendre le personnel attentif aux problèmes quotidiens rencontrés par les personnes âgées.

Le costume simule les effets de la vieillesse. Il est lesté de poids, pour reproduire la perte musculaire. Les genoux, les coudes et les poignets sont aussi bloqués. Chaque geste devient plus difficile à exécuter, explique à l'ats Camille-Angelo Aglione, secrétaire romand de CuraViva Suisse.

Très vite, il faut adapter son comportement. Comme les personnes âgées, le personnel se met à traîner les pieds dans les escaliers pour sentir les arêtes des marches, «car baisser la tête déséquilibre», détaille Camille-Angelo Aglione.

Prendre des mesures

En enfilant des gants en coton, les «cobayes» ressentent la même perte de sensibilité que les personnes âgées. Manipuler les objets ou prendre ses pilules devient difficile.

A la Résidence les Roches à Orvin (BE), le personnel ne comprenait pas pourquoi les résidents ne buvaient pas. En enfilant la combinaison, ils ont compris que les verres à thé étaient trop lourds et que les porter aux lèvres était difficile. Ils ont donc été changés.

Les personnes légères ou petites n'arrivaient pas à se retourner dans le lit. C'est «impossible lorsque le dos est bloqué», souligne Corinne Villard, de la Résidence les Roches. L'expérience a permis à l'établissement de répondre à certaines des questions qu'il se posait et de prendre des mesures adaptées.

Expérience révélatrice

En plus de la combinaison, le personnel soignant porte un casque auditif qui filtre les sons. Et une visière restreint le champ visuel. La teinture jaune reflète le vieillissement du cristallin.

Le temps d'enfiler la combinaison et «on a 75 ans» dit Camille-Angelo Aglione. Cela choque la plupart des personnes. Normalement, ces handicaps s'installent de manière progressive. Mais avec «AgeMan», le personnel expérimente le processus de vieillissement en un temps très restreint.

«C'est surtout la fatigue, la lenteur et les douleurs qui ont été relevées, le poids des années», explique de son côté Jeanne-Emmanuelle Jollien Héritier, infirmière-cheffe au home de Zambotte (VS).

«Cela a été une révélation.» Durant les études, on a été rendu attentif, mais «on ne peut qu'imaginer tant qu'on ne l'a pas vécu», renchérit Corinne Villard.

Modifications au quotidien

De manière générale, le personnel soignant a une écoute plus ciblée des besoins des résidents. «On était beaucoup dans la stimulation et le mouvement; mais nous nous sommes rendus compte que cela n'était pas une priorité pour le bien-être des résidents», reconnaît Corinne Villard.

A Zambotte, les adaptations n'ont pas été apportées de manière généralisée, mais pour chacun. Pour les personnes qui ont des problèmes de vue, les services, assiettes et verres sont toujours placés au même endroit. Elles repèrent ainsi mieux les choses. Au niveau de la prise en charge, «on va plus lentement, on laisse plus de temps», poursuit Jeanne-Emmanuelle Jollien Jollien Héritier.

Aussi pour le public

Au home de Bodenmatt à Malters (LU), une dizaine de visiteurs ont aussi eu la possibilité d'enfiler la combinaison. Une expérience intéressante, selon leurs réactions. «AgeMan» était présenté lors d'une exposition, pour la faire connaître.

A Embrach (ZH), des élèves ont enfilé le costume au centre régional. Ils ont ainsi pu expérimenter. Cela les a poussés à la réflexion. Pour les étudiants dans les branches de la santé, l'essai était aussi concluant.

Complément à la théorie

La combinaison constitue un complément à la théorie. Et un enrichissement, estime Corinne Villard. Elle pourrait être utilisée dans la formation de base, «une très bonne idée», selon elle. Mais «surtout en formation continue», selon Camille-Angelo Aglione.

«Il faudrait réitérer l'expérience périodiquement. Après un certain temps, on oublie et on reprend ses habitudes», conclut Jeanne-Emmanuelle Jollien Jollien Héritier.

(ats)

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