ProstitutionUne guerre des rues redoutée à Lausanne
La réduction géographique du racolage de rue aurait des conséquences graves pour les péripatéticiennes du chef-lieu du canton de Vaud, selon une étude. Une commission se prononcera mardi.
- par
- Sarah Zeines

Si le préavis est validé, il entrera en vigueur au printemps 2017. Les racoleuses des trottoirs s'en inquiètent.
Le trottoir peut-il se transformer en champ de bataille? Selon l'association Fleur de Pavé, qui défend les droits des travailleuses du sexe – quelque 270 exercent à Lausanne –, ce risque est imminent si la réduction de périmètre annoncée par la Municipalité devient une réalité. Communiqué en 2015, le préavis controversé sera traité mardi en séance de commission et vise une réduction du territoire de plus de deux tiers. Actuellement autorisée de la rue de Genève à la rue de Sébeillon, en passant par l'avenue de Sévelin, la prostitution de rue sera cantonnée à trois petites artères sous le nouveau régime. «Nous avons mené une étude sociologique auprès des principaux concernés, à savoir les praticiennes et une poignée de clients, informe Silvia Pongelli, directrice de Fleur de Pavé. Nous avons relevé un certain nombre de conséquences à prévoir au cas où le préavis serait validé.» Le ressenti rapporté du terrain est catégorique: 87,5% des travailleuses du sexe pensent que la mesure rendra leur activité plus compliquée, tandis que 77,5% s'inquiètent pour leur sécurité. Parmi les autres impacts à prévoir, des problèmes de cohabitation entre filles. «Il y a des conflits territoriaux, ce qui pourrait devenir un problème dans un périmètre aussi réduit, analyse Silvia Pongelli. Marginalisées dans un espace restreint et peu fréquenté, elles deviendront également plus vulnérables aux agressions. Elles seront loin de locaux abrités disponibles et ainsi enclines à se déplacer avec leurs clients, ce qui est évidemment déconseillé d'un point de vue sécuritaire. Les études dans d'autres villes montrent que la dispersion de l'activité est une façon d'éviter ces soucis.»
Si la prostitution de rue est sacrifiée à Lausanne, c'est au nom de la construction de logements. A la place des passes à la va-vite dans une allée sombre ou une petite chambre d'hôtel, 350 appartements animeront le quartier d'ici à 2020. Un projet qui réjouit Henri Klunge (PLR), membre de la commission qui se penchera sur la question la semaine prochaine. «Cela fait des années que les riverains se plaignent des problèmes de salubrité générés par cette activité», détaille le politicien. Pour sa part, Pierre-Antoine Hildbrand, Municipal chargé de la sécurité qui a hérité le dossier de son prédécesseur, Grégoire Junod, la mesure ne comporterait que des avantages. «Nous avons tenu compte de tous les paramètres de risque dans la rédaction du préavis, relève-t-il. Zurich a par ailleurs instauré une réduction de périmètre comparable à la nôtre et a obtenu les résultats escomptés. Nous resterons bien évidemment attentifs aux besoins des péripatéticiennes.» S'il est validé, le préavis entrera en vigueur au printemps 2017.