Attaque des RamblasUne marée humaine scande «je n'ai pas peur»
Des dizaines de milliers de personnes défilent à Barcelone suite aux attentats terroristes, à l'instigation du gouvernement catalan.
Une marée humaine a défilé samedi soir à Barcelone en reprenant pour slogan les mots «Je n'ai pas peur», à la suite des attentats islamistes en Catalogne qui ont fait 15 morts la semaine dernière. La police a estimé la foule à un demi-million de personnes.
«Emplissons les rues de paix et de liberté», avait souhaité la mairie de la deuxième de ville d'Espagne, Ada Colau, après le double attentat de Barcelone et de la station balnéaire de Cambrils, les 17 et 18 août, revendiqué par l'organisation Etat islamique (EI).
Fait exceptionnel, le roi Felipe VI s'est joint aux manifestants, devenant ainsi le premier souverain espagnol à participer à une manifestation depuis le rétablissement de la monarchie en 1975. Le chef du gouvernement espagnol Mariano Rajoy et le président catalan Carles Puigdemont étaient aussi présents dans la foule qui arborait des roses rouges, jaunes ou blanches, aux couleurs de Barcelone.
«Plus unis que jamais»
Ministres, chefs de partis, maires et présidents de régions étaient également venus en grand nombre. Des membres de la communauté musulmane d'Espagne ont défilé. Plusieurs orateurs ont lu des textes près d'un arrangement floral dessinant les mots de «Barcelone» et «Je n'ai pas peur» en plusieurs langues, dont l'arabe.
«Nous n'avons pas peur et nous ne consentirons pas à ce que le terrorisme nous humilie et nous vainque, parce que quand ils nous frappent, au lieu de nous diviser, ils nous trouvent plus unis que jamais», a ainsi lu la porte-parole d'une fondation promouvant la diversité, Míriam Hatibi, foulard sur la tête.
Les personnalités politiques se positionnaient cependant en retrait, plusieurs rangs derrière la banderole de tête. Selon le souhait de la municipalité, le tout premier rang était réservé aux «représentants des collectifs qui, dès la première minute, se sont occupés des victimes»: policiers, pompiers, chauffeurs de taxis, commerçants ou habitants des Ramblas.
«La meilleure réponse: la paix»
Le 17 août, une camionnette y a foncé sur les promeneurs. Treize sont morts et plus de 120 personnes d'une trentaine de nationalités ont été blessées. Depuis, le père d'un enfant de trois ans tué sur les Ramblas a pris publiquement dans ses bras l'imam de sa ville de Rubi en Catalogne. «Cette accolade symbolise la défaite de ceux qui nous ont fait mal», a commenté Ada Colau.
Les attentats au véhicule-bélier de Catalogne ont été perpétrés par six Marocains âgés de 17 à 24 ans ayant grandi ensemble dans une petite ville de Ripoll. Tous ont été tués par la police.
Dans la petite ville des Pyrénées, la soeur d'un djihadiste de 17 ans tué à Cambrils, a lu - entre des sanglots - un discours appelant à «rejeter le message islamiste» et «une idéologie perverse qui n'a ni rime ni raison», retransmis en direct par la télévision catalane.
Un message relayé par les pancartes brandies par la foule à Barcelone et proclamant «la meilleure réponse: la paix» ou encore «non à l'islamophobie».
A la fin de la marche, la foule recueillie a écouté deux violoncellistes interpréter le «Cant dels ocells» («Chant des oiseaux»), une chanson traditionnelle catalane dont le musicien Pau Casals (1876-1973) avait fait un symbole du rejet de la dictature de Francisco Franco.
Journée de trêve
De nombreux manifestants s'étaient munis de drapeaux indépendantistes catalans. A leur arrivée, Felipe VI et et Mariano Rajoy ont également dû essuyer des huées et sifflets, répétés ailleurs dans le cortège quand ils apparaissaient sur écran géant.
Alors que le torchon brûle depuis des mois entre Madrid et les autorités séparatistes catalanes, la marche unitaire de Barcelone marquait toutefois une trêve.
Une heure avant la manifestation officielle, un millier de catalans munis de drapeaux indépendantistes avaient manifesté en reprochant à l'Etat espagnol de vendre des armes à des pays comme l'Arabie Saoudite, accusés de liens avec l'islamisme radical. «Vos politiques, nos morts», criaient-ils, en dénonçant le fait que Madrid espère vendre prochainement cinq navires de guerre à Ryad.