Bienne avait ses magasins de cannabis

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Essais-pilotesBienne avait ses magasins de cannabis

Vingt ans avant Lausanne et Genève, de l'herbe était vendue sous contrôle à la frontière des cultures.

Vincent Donzé
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Vincent Donzé
Ici de l'herbe produite et consommée à Bienne.

Ici de l'herbe produite et consommée à Bienne.

le matin.ch/Vincent Donzé

À Lausanne et à Genève, deux magasins sont désormais consacrés à la vente régulée et non lucrative de cannabis. Trois types d'herbe sont proposés aux 250 consommateurs inscrits à ce projet-pilote. Les bénéfices serviront à la prévention et à la sécurité. Projet-pilote, vraiment?

Il y a vingt ans, à Bienne, une vingtaine de boutiques proposaient du chanvre, avant une vague de fermeture orchestrée par la police. Au cœur de cet essai: le préfet d'alors, Philippe Garbani, créateur en 1971 du premier centre de consultations pour toxicomanes, le «Drop-In». Entretien:

L'ancien préfet Philippe Garbani.

L'ancien préfet Philippe Garbani.

PS

Peut-on parler projet-pilote à Lausanne et Genève?

Oui, pour les cantons romands, une région qui rattrape son retard...

Son retard sur les cantons alémaniques?

On s'y est montré plus pragmatique, avec dans le domaine de la toxicomanie une volonté d'identifier les problèmes et de réduire les risques. On a compris plus tôt qu'en criminalisant les toxicomanes, on les met en prison où ils apprennent la délinquance.

La différence d'approche est-elle culturelle?

Les Romands gardent l'image de la Platzspitz de Zurich et de la Kocherplatz de Berne avec leurs héroïnomanes. Mais dans des cantons comme Appenzell ou St-Gall, sensibles aux produits naturels, on se soigne avec de l'herbe.

L'herbe pour les Alémaniques, le vin pour les Romands?

D'une certaine manière, sauf que la loi n'est pas la même pour tous les produits. Mais si dans les cantons romands, les autorités sont répressives, on y trouve des médecins progressistes, par exemple pour la prescription de méthadone. 

Du THC à 15%, c'est du lourd, non?

Ma parole: ils ont oublié une virgule à Lausanne! Le THC admis à Bienne était de 3%. Le but, c'est de vendre la marchandise la moins toxique et la moins coupée possible.

Le prix de 9 à 12 francs le gramme est-il correct?

Pourquoi appliquer le prix du marché noir? Pour casser ce marché, il faut proposer une marchandise meilleure marché!

Quelle était votre formule?

Tolérer les boutiques qui respectaient une charte, en contrôlant la bonne qualité et sans rien vendre aux mineurs. Celles dépourvues d'éthique et de règles étaient fermées.

Pourquoi l'expérience a-t-elle échoué?

Par la volonté des autorités cantonales et municipales, pourtant socialistes. Suite à l'échec de la révision de la LStup, en 2004, le cannabis est resté assimilé à une drogue dure. Les dernières boutiques ont fermé par crainte de la répression. Mettre le haschisch et l'héroïne au même niveau, c'est un problème.

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