ContestationEn Iran, la colère attisée par les morts dans les manifestations
Depuis le début du mouvement de contestation déclenché en Iran par la mort de Mahsa Amini il y a six semaines, l’ONG Iran Human Rights fait état d’au moins 160 morts.

Des manifestations ont lieu depuis plusieurs semaines partout dans le pays.
AFPDe nouvelles manifestations ont eu lieu vendredi en Iran pour protester contre le meurtre de participants au mouvement de contestation déclenché par la mort de Mahsa Amini il y a six semaines, selon des ONG et vidéos vérifiées par l’AFP.
Depuis la mort de cette Kurde iranienne de 22 ans le 16 septembre, la contestation, menée notamment par les femmes, ne faiblit pas. Mahsa Amini est décédée trois jours après son arrestation à Téhéran par la police des mœurs qui lui reprochait d’avoir enfreint le code vestimentaire strict de la République islamique.
Au slogan initial de «femmes, vie, liberté» se sont ajoutés, au fil de manifestations pourtant durement réprimées, des mots d’ordre ouvertement dirigés contre la République islamique fondée en 1979. Le mouvement est alimenté par la colère face au nombre de personnes tuées par les forces de l’ordre, qui peinent à l’éteindre: l’ONG Iran Human Rights (IHR) basée à Oslo fait état d’au moins 160 morts, dont une vingtaine de mineurs.
«Je tuerai quiconque a tué ma sœur»
Des ONG craignent une accélération de la répression alors que des hommages ont été rendus à la fin du deuil traditionnel de 40 jours aux premiers morts, tués au début du mouvement. Mercredi, des milliers de personnes avaient ainsi afflué à Saghez, la ville d’origine de Mahsa Amini dans la province du Kurdistan, pour cette fin du deuil.
Des incidents ont aussi éclaté jeudi près de Khorramabad (ouest) où une foule s’était rassemblée sur la tombe de Nika Shahkarami, 16 ans, morte 40 jours plus tôt, selon des vidéos vérifiées. «Je tuerai, je tuerai, quiconque a tué ma sœur», scandaient les manifestants dans une vidéo publiée par HRANA, un groupe de défense des droits basé aux États-Unis.
D’autres incidents se sont produits jeudi après l’enterrement d’un manifestant de 35 ans, Ismaïl Mauludi, à Mahabad (ouest) où les forces de sécurité ont ouvert le feu et tué trois personnes, selon le groupe de défense des droits humains Hengaw.
Tirs à Zahedan
«Mort au dictateur», criaient les manifestants, visant le guide suprême l’ayatollah Ali Khamenei, alors que les bureaux du gouverneur de Mahabad brûlaient, selon les images d’une vidéo vérifiée, publiée en ligne. Deux autres manifestants sont morts à Baneh (ouest), selon Hengaw. Au total, huit manifestants dans quatre provinces (Kurdistan, Azerbaïdjan occidental, Kermanshah et Lorestan) ont été tués entre mercredi soir et jeudi, a indiqué jeudi Amnesty International.
Par ailleurs, la ville de Zahedan, dans la province du Sistan-Baloutchistan (sud-est), l’une des plus pauvres d’Iran, a été touchée par plusieurs jours de violences déclenchées le 30 septembre lors de manifestations contre le viol d’une jeune fille imputé à un policier, qui ont fait au moins 93 morts selon l’IHR.
Mort de civils «innocents»
Les médias proches du pouvoir iranien avaient décrit les affrontements de Zahedan comme un «incident terroriste» dirigé contre un poste de police et ayant conduit à la mort d’au moins huit membres des forces de sécurité.
Vendredi, les forces de sécurité ont tiré sur des manifestants à Zahedan, ont affirmé les ONG HRANA et IHR, publiant des vidéos montrant des protestataires prendre la fuite après des coups de feu. En soirée, le Conseil de sécurité du Sistan-Baloutchistan a affirmé qu’une personne a été tuée à la suite de tirs «non identifiés» et 14 autres, dont des membres des forces de sécurité, ont été blessées lors «d’émeutes» à Zahedan.
Les autorités iraniennes ont limogé deux hauts responsables de la sécurité à Zahedan, dont le chef de la police, après la publication d’une enquête faisant étant de «négligences de la part de certains officiers» ayant conduit à la mort de civils «innocents».