LondresL’éventuelle extradition d’Assange doit être réexaminée
La justice britannique avait refusé d’extrader le fondateur de WikiLeaks aux USA en raison d’un risque de suicide. Mais le recours des USA doit être examiné sous peu.

Julian Assange ici en mai 2019.
AFP«Terroriste high tech» ou héros traqué de la liberté d’informer, le fondateur de WikiLeaks Julian Assange, réclamé par les Etats-Unis, fait figure d’ardent défenseur de la transparence à tout prix, dont l’image s’est troublée au fil des années.
A 50 ans, l’Australien à la chevelure argentée peut se féliciter d’avoir gagné une manche capitale, la justice britannique s’étant opposée en janvier à son extradition en raison d’un risque de suicide. Mais les Etats-Unis n’ont pas dit leur dernier mot et leur appel sera examiné à partir de mercredi à Londres.
Julian Assange y est poursuivi pour la diffusion en 2010, sur sa plateforme WikiLeaks, de plus de 700’000 documents concernant les activités militaires et diplomatiques de Washington.
175 ans de prison
Il risque jusqu’à 175 ans de prison et reste incarcéré à la prison de haute sécurité de Belmarsh, dans le sud-est de Londres. Il y avait été amené immédiatement après avoir été extrait en avril 2019 de l’ambassade d’Equateur, où il s’était réfugié sept ans plus tôt, déguisé en coursier, alors sous le coup de poursuites pour viol en Suède, depuis abandonnées.
Pendant ses années de réclusion dans ces locaux diplomatiques, Assange a eu deux enfants avec l’une de ses avocates, Stella Moris, une Sud-Africaine de 37 ans.
Son image de «cyber-warrior» s’est brouillée au fil des ans, en particulier avec la diffusion par sa plateforme, en 2016, à un moment-clé de la campagne présidentielle américaine, de milliers de courriels piratés provenant du Parti démocrate et de l’équipe d’Hillary Clinton qui ont contribué à fragiliser la candidate.
Ces révélations avaient alors suscité des éloges appuyés du candidat Donald Trump, qui avait lancé lors d’un meeting: «J’adore WikiLeaks !» Selon la CIA, ces documents ont été obtenus auprès d’agents russes, ce que nie la plateforme.
Cet épisode a alimenté les soupçons par ses détracteurs de collusion avec la Russie d’un Assange dont les révélations se font souvent au détriment des Etats-Unis, et qui a collaboré avec la chaîne de télévision RT, proche du Kremlin.
Comme Tom Sawyer
L’Australien a commencé sa vie ballotté de droite à gauche par sa mère, Christine Ann Assange, une artiste de théâtre séparée de son père avant sa naissance.
Il compare son enfance à celle de Tom Sawyer, entre construction de radeau et explorations diverses de son environnement. A 15 ans, il a déjà vécu dans plus de 30 villes australiennes avant de se poser à Melbourne où il étudie les mathématiques, la physique et l’informatique.
Doué, travailleur, il est happé par la communauté des hackers et commence à pirater les sites internet de la Nasa ou du Pentagone en utilisant le pseudonyme de «Mendax».
C’est à cette époque qu’il a un premier fils, Daniel, dont il se disputera la garde avec la mère. Lorsqu’il lance WikiLeaks dans le but de «libérer la presse» et de «démasquer les secrets et abus d’Etat», il devient, selon un de ses biographes, «l’homme le plus dangereux du monde».
Il se fait connaître du grand public en 2010 avec la publication de centaines de milliers de documents américains. Un coup d’éclat qui lui vaut d’être présenté comme un champion de la liberté d’informer.
Un terroriste high tech
Dix ans avant son élection à la présidence des Etats-Unis, Joe Biden, alors vice-président de Barack Obama, estime que Julian Assange s’apparente davantage à un «terroriste high tech» qu’à un héritier des «Pentagon papers» ayant révélé dans les années 1970 les mensonges des Etats-Unis sur la guerre du Vietnam.
«Selon le vice-président nord-américain, la vérité sur les Etats-Unis, c’est du terrorisme», avait rétorqué Assange.
Sa notoriété grandit, les critiques s’accumulent.
En 2011, les cinq journaux (dont The New York Times, The Guardian et Le Monde) associés à WikiLeaks condamnent la méthode de la plateforme, qui rend publics des télégrammes du département d’Etat américain non expurgés. Ils estiment que les documents sont susceptibles de «mettre certaines sources en danger». La critique sera reprise par le lanceur d’alerte Edward Snowden.
Mais un noyau dur lui est resté fidèle, à l’instar de l’actrice américaine Pamela Anderson, et nombre d’associations de journalistes ou de défense des droits humains se sont opposées à son extradition vers les Etats-Unis.