Une lourde découverte dans l’atmosphère de deux planètes

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AstrophysiqueUne lourde découverte dans l’atmosphère de deux planètes

Le spectrographe ESPRESSO a permis de détecter du baryum autour de deux exoplanètes, à une altitude où cet élément de poids ne devrait pas se trouver.

par
Comm/M.P.
Cette impression d’artiste montre une exoplanète ultra-chaude sur le point de transiter devant son étoile hôte. Lorsque la lumière de l’étoile traverse l’atmosphère de la planète, elle est filtrée par les éléments chimiques et les molécules de la couche gazeuse. Avec des instruments sensibles, les signatures de ces éléments et molécules peuvent être observées depuis la Terre.

Cette impression d’artiste montre une exoplanète ultra-chaude sur le point de transiter devant son étoile hôte. Lorsque la lumière de l’étoile traverse l’atmosphère de la planète, elle est filtrée par les éléments chimiques et les molécules de la couche gazeuse. Avec des instruments sensibles, les signatures de ces éléments et molécules peuvent être observées depuis la Terre.

ESO/M. Kornmesser

Une équipe internationale comprenant des scientifiques de l’Université de Genève (UNIGE) et du Pôle de Recherche National (PRN) PlanetS a détecté l’élément le plus lourd jamais trouvé dans l’atmosphère d’une exoplanète: le baryum. Cette prouesse a été possible grâce à ESPRESSO, un spectrographe développé en grande partie par l’UNIGE et installé sur le Very Large Telescope de l’Observatoire européen austral (VLT de l’ESO).

Les scientifiques ont été surpris de découvrir un tel élément à haute altitude dans l’atmosphère des géantes gazeuses ultrachaudes WASP-76 b et WASP-121 b, leur forte gravité devant en effet entraîner (en théorie) celui-ci vers leurs couches profondes. Cette étude, à découvrir dans le journal «Astronomy & Astrophysics», soulève des questions sur la nature de ces atmosphères exotiques.

Savoir-faire genevois

«Cette découverte vient une nouvelle fois démontrer l’efficacité du savoir-faire genevois en matière de spectroscopie de haute précision», commente Francesco Pepe, professeur ordinaire au Département d’astronomie de l’UNIGE, coauteur de cette recherche et principal initiateur de l’instrument ESPRESSO. «Cet instrument nous permet à la fois de détecter avec précision de nouvelles exoplanètes par la méthode des vitesses radiales, mais aussi de caractériser de manière pointue la composition de l’atmosphère des exoplanètes, comme le démontre cette étude».

WASP-76 b et WASP-121 b ne sont pas des exoplanètes ordinaires. Elles sont toutes deux connues sous le nom de Jupiter ultra-chaudes, car leur taille est comparable à celle de Jupiter, mais leur température de surface est extrêmement élevée, dépassant les 1000 °C. Cela s’explique par la proximité de ces planètes avec leur étoile hôte. Leur orbite autour de celle-ci ne dure qu’un à deux jours, ce qui leur confère des caractéristiques plutôt exotiques: sur WASP-76 b, par exemple, les astronomes soupçonnent qu’il pleut du fer.

Une découverte accidentelle

La détection de baryum est «en quelque sorte d’une découverte «accidentelle», déclare Tomás Azevedo Silva, doctorant à l’Université de Porto et à l’Instituto de Astrofísica e Ciências do Espaço (IA) au Portugal, qui a dirigé l’étude. Nous ne nous attendions pas ou ne cherchions pas de baryum en particulier et nous avons dû vérifier par recoupement que celui-ci provenait bien de la planète, car la présence de ce métal n’avait jamais été identifiée sur une exoplanète auparavant».

Ainsi, les scientifiques ont été surpris de trouver du baryum, qui est 2,5 fois plus lourd que le fer, dans les couches supérieures de l’atmosphère des deux planètes. «Il doit ainsi y avoir un mécanisme physique que nous ne connaissons pas et qui amène le Baryum dans les couches supérieures de l’atmosphère de ces Jupiter chaudes», explique David Ehrenreich, professeur associé au sein du Département d’astronomie de l’UNIGE et coauteur de l’étude.

Des mondes très étranges

Le fait que du baryum ait été détecté dans l’atmosphère de celles-ci suggère que cette catégorie de planètes pourrait être encore plus étrange qu’on ne le pensait. La question pour les scientifiques est maintenant de déterminer le processus naturel qui pourrait provoquer la présence de cet élément lourd à des altitudes aussi élevées sur ces exoplanètes. Grâce à de futurs instruments, tels que le spectrographe échelle à haute dispersion ArmazoNes (ANDES), qui fonctionnera sur le prochain Extremely Large Telescope (ELT) de l’ESO, les astronomes de l’UNIGE, de PlanetS et du monde entier pourront étudier les atmosphères des exoplanètes, grandes et petites. Ces instruments permettront également d’analyser celles des planètes rocheuses similaires à la Terre, de manière beaucoup plus approfondie et recueillir davantage d’indices sur la nature de ces mondes étranges.

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