EscaladeKatherine Choong, première grimpeuse à conquérir la voie Hattori
La grimpeuse jurassienne a réalisé un exploit: celui de conquérir une face difficile du Titlis. Aucune femme n’y était parvenue avant elle, et ce depuis l’ouverture de la voie Hanzo Hattori en 2013.


Katherine Choong a réalisé l’exploit sur la face nord du Titlis.
Katherine ChoongQuand Katherine Choong se lance dans l’ascension d’une falaise, elle sait qu’elle doit assurer, ou alors il lui faudra parfois patienter de longs mois pour tenter à nouveau l’ascension. Cela lui était d’ailleurs arrivé en Espagne. «Je suis tombée de tout en haut, cela m’a déprimé», raconte-t-elle. Il a fallu se résigner à rentrer puis à passer à autre chose. «J’étais obsédée, je m’étais mis une pression folle.»
Ce même acharnement lui a permis de se dépasser à Engelberg-Titlis. Là-bas, la grimpeuse est devenue la première femme à avoir conquis Hattori Hanzo, une voie d’une difficulté 8b+. Depuis son ouverture en 2013, seuls des hommes y étaient parvenus.
Une activité prenante
Prise d’une passion pour son sport, la Jurassienne a décidé de vivre de l’escalade, le temps justement de réaliser ses objectifs. «Je vise la finale de Coupe du monde et un 9a», explique-t-elle. Assise sur son canapé, elle dégage une sérénité très éloignée de la personnalité d’acharnée qu’elle décrit.
La grimpeuse sait qu’il suffit d’un déclic pour aller plus haut. Elle revient sur un passage qui l’avait bloquée pendant des jours. Un obstacle difficile, qui requiert un mouvement long et dynamique. Aucune imprécision n’est possible dans le geste. Sinon, c’est la chute, et il faut repartir de zéro.
«Il faut décortiquer le parcours», explique-t-elle. Pour surmonter son blocage, elle a reproduit les prises et l’inclinaison sur son mur d’escalade privé. Là, elle pouvait perfectionner ce geste si problématique. Elle s’est ensuite entraînée, jusqu’à avoir compris. Quelle impulsion, quelle force. Ce n’est qu’après qu’elle peut retourner au pied du mur, pour enfin le surmonter.
«Sur place, il n’y a pas beaucoup d’essais possibles.» Les muscles fatiguent au fur et à mesure de la progression. La peau s’abîme, l’ensoleillement est adéquat pendant une heure ou deux seulement et le moral prend lui aussi un coup. «J’ai déjà voulu abandonner», concède l’ancienne championne du monde junior. À force, la grimpeuse connaît ses propres capacités. Ses forces, ses faiblesses, le tout accompagné de sa motivation lui font atteindre des sommets.
«J’avais l’habitude d’une hauteur de 20 à 30 mètres, maintenant j’évolue à 200 ou 300 mètres»
La volonté va un bout, mais la morphologie limite. «Je demande à mes amis si la voie convient aux petits», explique l’athlète. Son mètre 58 lui inflige forcément une allonge moins grande qu’une sportive d’1m90. «On compense, rassure-t-elle. On monte les pieds plus haut, et le fait d’être plus léger est un avantage.» Elle bénéficie du soutien de son compagnon, Jim, qui l’accompagne dans la plupart de ses aventures. Car si elle faisait partie de l’équipe de Suisse d’escalade, elle a changé de direction pour se concentrer sur ces murs naturels à ciel ouvert.
La salle de Bienne, si souvent fréquentée, a disparu de son planning. La grimpe s’effectue désormais aux quatre coins du globe. «J’avais l’habitude d’une hauteur de 20 à 30 mètres, maintenant j’évolue à 200 ou 300 mètres», sourit-elle. Elle a visité la Chine, le Japon, la France et évidemment certains coins de Suisse. Le rythme? «Deux jours d’escalade, un jour de pause», répond la Jurassienne.
Parfois coupée du monde, parfois posée dans un café pour échanger avec ses proches grâce au wifi, l’exploration est le maître-mot. «J’aime découvrir de nouvelles voies et profiter d’un voyage hors des sentiers battus», affirme-t-elle en ajoutant que «l’escalade est particulièrement propice à cette vie-là».