FootballAnalyse: Bâle doit rectifier sa naïveté
À l’heure de recevoir l’OM en 8e de finale retour de Ligue Europa Conférence, le FC Bâle a encore toutes les chances de se qualifier. Mais il faudra gommer les erreurs commises au Vélodrome.


Malgré une belle performance de son ailier vaudois Dan Ndoye, le FC Bâle a souffert face à l’OM et Dimitri Payet.
AFPLe football de haut niveau est affaire de détails. Il suffit de pas grand-chose pour faire basculer le sort d’une rencontre, d’une équipe (demandez au PSG). Le FC Bâle en a apporté une nouvelle confirmation jeudi dernier, à Marseille, en 8e de finale aller de Ligue Europa Conférence. À la 79e minute, l’actuel 2e de Super League était sous l’eau, mené 2-0, et se dirigeait vers une élimination programmée. 6 minutes plus tard, il s’en est fallu de quelques centimètres pour que le tableau d’affichage passe à 2-2, Steve Mandanda évitant de justesse un contre son camp de Valentin Rongier. Si le FCB s’est finalement incliné (1-2), le score ainsi que les frissons générés en fin de match lui ouvrent des perspectives inattendues en vue du retour au Parc Saint-Jacques, ce jeudi (18h45).
Bâle peut croire à un retournement de situation. Mais entre l’espoir et la réalisation existe un gouffre sur lequel Guillermo Abascal et son staff ont dû plancher depuis une semaine. Les Rhénans n’ont certes besoin que d’un but pour remettre les compteurs à zéro. Mais ils le doivent avant tout à la terrible maladresse de l’OM dans le dernier geste. Pour parvenir à leurs fins, ils devront montrer autre chose qu’au Vélodrome, où ils ont affiché des failles béantes.
Annihilés par la pression marseillaise
Jamais, cette saison, le FC Bâle n’a été autant privé du ballon que jeudi dernier: seulement 31% de possession. C’est vrai, l'Olympique de Marseille constitue l’opposition la plus forte qu’il a rencontré jusqu’à présent. Mais les proportions dans lesquelles il s’est fait dominer étaient trop importantes.
En difficulté ces dernières semaines, les Marseillais ont retrouvé de la fougue face aux Bâlois. Ces derniers ont été soumis à un intense pressing, du début à la fin, auquel ils n’ont pas su répondre. Leur rival leur a laissé peu de latitude, en illustre son PPDA (passes accordées à l’adversaire par action défensive): 9,7.
Structurellement, le vice-champion de Suisse n’était pas armé pour répondre à ce défi. Dans l’animation offensive, il est resté fidèle à son 4-2-4 rodé en Super League. Cette option a l’inconvénient de dégarnir le milieu de terrain, ce qui a posé problème aux Rhénans: en infériorité numérique dans ce secteur, il leur était impossible de se sortir de l’étreinte par du jeu court, les contraignant à avoir trop souvent recours à des longs ballons. Sans grand succès.

En attaquant en 4-2-4, les Rhénans ne créent aucune supériorité numérique au milieu. Les options sont restreintes.
Régulièrement sans solution à la récupération, ils ont rendu le cuir trop facilement. Ainsi, leur temps de possession s’élève seulement à 11 secondes en moyenne, contre 27 du côté de l’OM.
Un pressing désordonné
En phase défensive, la formation de Guillermo Abascal s’articulait autour d’un 4-4-2 à plat et un bloc mi-médian mi-bas. Habituée à faire le jeu en championnat (57,2% de possession en moyenne, la plus haute à égalité avec Young Boys), elle n’a pas complètement accepté d’être dominée au Vélodrome.
Ses attaquants ont parfois pris l’initiative d’aller presser les défenseurs adverses, sans être accompagnés par leurs coéquipiers. Conséquences: un premier rideau facilement éliminé et des boulevards offerts aux Marseillais. Qui ne se sont d’ailleurs pas gêné pour en profiter. Le deuxième but d’Arkadiusz Milik en est le parfait exemple.
Une compacité défaillante
Il n’y a pas que sur les phases de pressing où le FC Bâle s’est fait transpercer. Sur attaque placée également. La clé du succès des Olympiens réside dans leur activité entre les lignes, que Bâle n’est pas parvenu à contenir. En possession du ballon, c’est-à-dire plus des trois quarts du match, l’OM se déployait en 4-1-5 ou 4-1-2-3. Une variante du 4-3-3 où les deux milieux relayeurs - ici Dimitri Payet, Gerson, Mattéo Guendouzi ou Valentin Rongier, selon les permutations - évoluent à hauteur ou presque de l’avant-centre et des ailiers et occupent les demi-espaces, si difficiles à défendre.

Le 4-1-5 appliqué en phase offensive par l’OM face au 4-4-2 à plat du FC Bâle.
Positionnés entre les milieux et les défenseurs bâlois, les cinq de devant ont représenté un danger constant. Surtout parce qu’ils étaient trouvés bien trop aisément. Les «Rot-Blau» se sont rendus coupables de mauvais alignements, fermant mal les intervalles et ouvrant ainsi facilement des angles de passe. Payet, notamment, s’est délecté de ces brèches, qui lui ont permis d’exprimer pleinement ses qualités de meneur.
L’ancien joueur de West Ham a été davantage suivi en deuxième période, les visiteurs passant dans un 4-1-4-1 où Taulant Xhaka était chargé de mieux contrôler les décrochages, ce qui n’a pas empêché les Phocéens de se montrer menaçants. La majorité de leurs situations dangereuses a découlé de combinaisons entre les lignes. Preuve que le bloc rhénan manquait cruellement de compacité. Heureusement, l’OM a fait preuve d’une grande maladresse dans le dernier geste.
Quelques motifs d’espoir…
Si la prestation d’ensemble du FCB n’est clairement pas à son avantage, certains points méritent tout de même d’être relevés. À commencer par la prestation de Dan Ndoye. L’ailier vaudois, auteur de deux grosses occasions, a montré des séquences intéressantes. Il a parfois fait avancer le jeu de son équipe à lui seul, grâce à sa percussion. Un atout qu’il faudra continuer d’exploiter au retour. Car dans sa zone, les deux latéraux gauche marseillais - Luan Peres et Sead Kolasinac - ne soutiennent pas la comparaison en matière de vitesse.
D’autre part, Bâle a plutôt bien réussi à couper la relation entre Boubacar Kamara et la ligne offensive. La jeune sentinelle française est un rouage essentiel de l’OM, par sa capacité à maintenir l’équilibre structurel de sa formation et perforer l’organisation adverse par la passe. La doublette Sebastiano Esposito/Fedor Chalov a effectué un gros travail pour l’isoler, en le marquant à tour de rôle ou en s’intercalant entre lui et ses défenseurs centraux. Cette stratégie a en fait déplacé le problème: responsabilisés balle au pied, Duje Caleta-Car et William Saliba s’en sont bien tirés, parvenant régulièrement à servir les attaquants en sautant les lignes. Une illustration de l’importance de Kamara qui, en mobilisant deux joueurs, a ouvert des espaces pour ses partenaires.
Mais, côté suisse, il y a là quelque chose à réitérer ce jeudi. Payet étant suspendu au retour, l’OM doit composer sans son meilleur créateur. Et si, en son absence, Kamara est aussi bien cadré qu’à l’aller, les Ciel et Blanc devront se reposer sur des individualités bien moins fiables.
Enfin, si Bâle a globalement mal exploité son 4-2-4, il a élaboré certaines constructions prometteuses et prouvé qu’il possédait des alternatives au jeu long. Comme lorsque ses offensifs se sont synchronisés pour proposer à la fois des appels en profondeur et des décrochages, afin de dégager de l’espace au cœur du jeu. Par ailleurs, le but d’Esposito provient d’une percée de Wouter Burger depuis l’arrière. Le genre d’initiative à reproduire.
Les Bâlois ne bousculeront pas l’OM en restant cachés. À domicile, ils devront forcément prendre des risques, dans les transmissions et les déplacements. En somme, dynamiser leur animation. Au moins devraient-ils pouvoir compter sur le retour de leur milieu offensif Valentin Stocker, qui apportera des garanties techniques.