Pour la justice californienne, les bourdons sont des poissons

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BizarrePour la justice californienne, les bourdons sont des poissons

Cette étrange décision d’une Cour d’appel permet en fait de faire bénéficier ces insectes pollinisateurs du même régime légal que d’autres espèces en danger.

Michel Pralong
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Michel Pralong
Non, le bourdon n’évolue pas sous l’eau, mais désormais bénéficie des mêmes protections que les autres espèces en danger.

Non, le bourdon n’évolue pas sous l’eau, mais désormais bénéficie des mêmes protections que les autres espèces en danger.

Getty Images/iStockphoto

À quoi tient peut-être la survie d’une espèce. La justice californienne discute depuis quelques années pour savoir si le bourdon peut être considéré comme un poisson. Et cela n’a rien d’un poisson d’avril. L’idée est de compléter la liste des animaux en voie de disparition protégés par la loi californienne.

Car celle-ci a été conçue pour protéger «les espèces ou sous-espèces indigènes d’un oiseau, d’un mammifère, d’un poisson, d’un amphibien, d’un reptile ou d’une plante». Manquent donc notamment à l’appel les insectes. En 2018, plusieurs associations de défense des animaux ont demandé d’inscrire quatre espèces de bourdons menacés à cette liste: le bourdon Crotch, le bourdon Franklin, le bourdon coucou Suckley et le bourdon occidental. Pour faire bénéficier ces animaux de cette protection, on a tenté de profiter de la définition large du terme «poisson» dans la loi.

Une faille chez les invertébrés

Il y est en effet écrit qu’est considéré comme un poisson «un poisson sauvage, un mollusque, un crustacé, un invertébré, un amphibien, ou une partie, un frai ou l’ovule de l’un de ces animaux». Or, les bourdons sont des invertébrés, donc ne pourraient-ils pas être classifiés comme poissons aux yeux de la loi?

Douche froide en 2020, lorsque la Cour supérieure du comté de Sacramento a dit que non car, de toute évidence, la loi ne faisait référence qu’aux invertébrés marins. Les bourdons avaient donc du plomb dans l’aile.

Mais c’est la Cour d’appel du troisième district de Californie qui a volé à leur secours en prenant une décision en leur faveur le 31 mai dernier. «Bien que le terme poisson soit familièrement et communément compris comme faisant référence aux espèces aquatiques, le terme technique employé par le législateur dans la définition du poisson à l’article 45 n’est pas aussi limité», a estimé le tribunal, comme le rapporte CNN. Et donc, on peut élargir cette définition à tout invertébré, comme le précise ce jugement. Bourdons compris.

À l’heure où ces insectes sont dangereusement menacés en raison du changement climatique, cette décision a été applaudie notamment par la Société Xerces pour la conservation des invertébrés: «La décision de la Cour permet à la Californie de protéger certains de ses pollinisateurs les plus menacés, une étape qui contribuera à la résilience des écosystèmes et des fermes indigènes de l’État». Ou quand un tribunal fait une fleur à un bourdon.

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