Séisme en TurquieDans les ruines, le cauchemar sanitaire des survivants
Après le séisme qui a frappé la Turquie et la Syrie, des millions de sans-abri n’ont nulle part où se doucher et faire leurs besoins. Ils sont en plus exposés aux maladies contagieuses.

Les premiers jours, les survivants du terrible tremblement de terre du 6 février ont été contraints de se soulager dans les décombres ou dans des toilettes débordant d’excréments.
photo d’illustration REUTERSDans les villes réduites en ruines et en poussière du sud de la Turquie et de Syrie, se doucher et trouver des toilettes est une obsession pour les rescapés, qui craignent l’apparition d’épidémies. Les premiers jours, les survivants du terrible tremblement de terre du 6 février ont été contraints de se soulager dans les décombres ou dans des toilettes débordant d’excréments.
Depuis, des toilettes portatives – comme on en voit sur les chantiers – ont été installées çà et là dans les grandes villes touchées, mais celles-ci sont très loin de suffire. Des millions de personnes n’ont désormais plus de toit.
«État désastreux»
Une rangée de quinze toilettes portatives bleues et blanches a ainsi été alignée sur un pont du centre de la ville turque d’Antakya, qui comptait près de 400’000 habitants avec sa périphérie avant le séisme. Leur évacuation se fait directement sur la chaussée. «C’est notre principal problème. On se débrouille pour y aller tôt le matin, mais c’est quand même vraiment pas terrible, elles sont dans un état désastreux. Il n’y a pas d’eau», indique Nurhan Turunc, 42 ans.
«On n’est pas mort dans les ruines, mais on risque de mourir de maladie.»
Sedef, 18 ans, est venue quand même, car celles de l’école où elle a trouvé refuge sont pires encore. «On n’est pas mort dans les ruines, mais on risque de mourir de maladie», dit-elle. Un petit message laissé sur la porte d’un de ces w.-c. supplie les usagers «d’utiliser les toilettes comme des humains», afin d’éviter qu’elles ne se salissent trop vite.
Plus au nord, à Kahramanmaras, proche de l’épicentre du séisme, Husne Duz, une habitante de 53 ans, se plaint également du manque de lieux d’aisances. «Il n’y a pas de toilettes, il faudrait en installer dans des tentes: les gens pissent juste à l’extérieur. Il nous faut des toilettes et des douches. Il faut aussi qu’on puisse laver nos affaires», se plaint-elle.
Cinq kilomètres jusqu’à la mosquée
Erdal Lale, 44 ans, a trouvé une solution à la mosquée située au centre de la ville, et toujours miraculeusement debout, quand tant d’autres se sont effondrées. «Il n’y a que ces toilettes qu’on peut utiliser, j’ai marché cinq kilomètres pour arriver jusqu’ici. On a un problème. Et encore, nous sommes des hommes, mais les femmes?» relève-t-il.
Hacer Yildirim, une volontaire venue des Pays-Bas, dresse la liste des nécessités: «Les gens demandent des lingettes, des savons, du shampooing et des douches. Ici, il y a de l’eau, mais nulle part où se doucher.»
«Les conditions d’hygiène sont mauvaises, il y aura évidemment des maladies contagieuses», prévient Sedat Akozcan, le représentant de la Chambre des pharmaciens de la province d’Hatay, celle d’Antakya. Lui et ses confrères ont installé plus d’une douzaine de pharmacies de fortune sous des tentes rouges et blanches à Antakya, devant lesquelles se sont formées de longues files d’attente. Une trentaine de pharmaciens s’y relaient pour accueillir, chaque jour, plus d’un millier de patients incapables de se rendre dans leur dispensaire habituel.
«Beaucoup d’infections respiratoires»
Sedat Akozcan rappelle aussi que les températures, qui tombent à zéro degré la nuit à Antakya – pire encore dans les zones montagneuses autour de Kahramanmaras, avec des -15°C par endroits –, créent un risque pour les enfants en bas âge. «L’hiver est très froid, et on voit beaucoup d’infections respiratoires chez les petits», dit-il, même s’il n’y a pas, à ce stade, d’épidémies en cours ni de maladies contagieuses.