HondurasL’«État en voie de décomposition» à l’heure de la présidentielle
Dimanche, le Honduras vote pour la présidentielle. Treize candidats sont en lice pour diriger un pays déchiré, le scrutin s’annonçant serré, voire électrique.

Plus de la moitié des dix millions de Honduriens vivent sous le seuil de pauvreté, et la pandémie de coronavirus n’a fait qu’accentuer la misère.
AFPLes Honduriens sont appelés aux urnes, ce dimanche, pour élire le président d’un pays en proie à un climat de violence généralisée et à de puissants gangs de trafiquants de drogue qui ont étendu leur corruption jusqu’au plus haut niveau de l’État. De plus, beaucoup de jeunes ont perdu foi en leur pays et ne placent leurs espoirs d’un avenir meilleur que dans l’émigration vers les États-Unis. Le Honduras «est un État en voie de décomposition, partiellement investi par le crime organisé», décrit Victor Meza, directeur d’une ONG prodémocratie.
Depuis le coup d’État qui a renversé le président de gauche Manuel Zelaya, en 2009, le pays a été dirigé par le Parti national (PN, droite conservatrice), sous la férule du président sortant Juan Orlando Hernandez, soupçonné par Washington d’être impliqué dans le trafic de drogue.
Le Parti national durcit le ton
Xiomara Castro, épouse de l’ex-président Zelaya et leader de Libre, le parti de gauche, est donnée favorite par plusieurs sondages, mais le PN, représenté par le maire de la capitale Tegucigalpa, Nasry Asfura, n’a pas dit son dernier mot. «Après une douzaine d’années de pouvoir du Parti national, marqué par la corruption généralisée et la violence criminelle, la majorité des Honduriens en ont assez et semblent vouloir un changement», estime Michael Shifter, président de Dialogue interaméricain.
Sentant le vent tourner, le PN a durci le ton de sa campagne, taxant la leader de Libre de «communiste» et vilipendant ses propositions de légalisation de l’avortement et du mariage homosexuel, des thèmes particulièrement polémiques dans ce petit pays conservateur, où la population partage ses croyances entre Église catholique et obédiences évangéliques.
Le parti de droite est en outre réputé pour ne pas reculer devant la fraude pour gagner des élections. En 2013, le président sortant a battu d’une courte tête Xiomara Castro, et est ensuite passé outre la Constitution pour pouvoir se présenter pour un second mandat, en 2017. Sa douteuse réélection sur le fil, face à la star de la télévision Salvador Nasralla, avait déchaîné de violentes manifestations.
La moitié sous le seuil de pauvreté
Le scrutin s’annonce serré et le lendemain du vote sous tension. Si Xiomara Castro gagne avec une faible marge, «le Parti national criera à la fraude», avertit Victor Meza, directeur d’une ONG prodémocratie. Si Nasry Asfura l’emporte, il ne fait aucun doute que «l’opposition ne l’acceptera pas».
Plus de la moitié des dix millions d’habitants vivent sous le seuil de pauvreté et la pandémie de coronavirus n’a fait qu’accentuer la misère. Le chômage a presque doublé en un an, passant de 5,7% en 2019 à 10,9% en 2020. Cependant, les propositions concrètes ont été presque totalement absentes de la campagne électorale. Yani Rosenthal, du Parti libéral (centre droit), troisième dans les sondages sur treize candidats en lice, a seulement promis de donner chaque mois à chaque adulte un bon d’achat d’une valeur de 60 dollars. Mais cette proposition est reçue avec scepticisme de la part d’un candidat qui a purgé trois ans de prison aux États-Unis pour blanchiment d’argent de la drogue.