Guerre en UkraineL’Occident frappe la Russie au portefeuille
Le secteur financier est le pilier de la stratégie occidentale d’isolement de Moscou. L’objectif assumé est de «couper tous les liens entre la Russie et le système financier mondial».

Le ministre français de l'Économie et des Finances Bruno Le Maire (au centre) et les participants à la réunion informelle de l'Ecofin et de l'Eurogroupe posent pour une photo au ministère de l'Économie à Paris, le 25 février 2022.
AFPLes pays occidentaux frappent au portefeuille : le secteur financier est au centre des mesures envisagées pour sanctionner la Russie après son invasion de l’Ukraine. L’objectif assumé est de «couper tous les liens entre la Russie et le système financier mondial», a encore affirmé vendredi le ministre français de l’Économie Bruno Le Maire, avant une réunion avec ses homologues européens sur le sujet à Paris.
Le tour des sanctions
Après un premier train de sanctions ciblant surtout des proches de Vladimir Poutine, l’Union européenne veut désormais limiter drastiquement l’accès de la Russie aux marchés de capitaux européens. Les Européens ont décidé ce vendredi le gel des avoirs dans l’UE du président russe Vladimir Poutine et son ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov. Le Royaume-Uni, lui, compte empêcher les entreprises publiques comme privées de lever des fonds sur son sol et limiter les sommes que les Russes peuvent détenir sur leurs comptes bancaires britanniques.
Washington a ciblé de son côté un certain nombre d’acteurs financiers, dont les deux principales banques russes, Sberbank et VTB Bank. «Exclure une banque du système financier américain, cela revient à l’empêcher de réaliser des paiements en dollars», traduit Stephen Le Vesconte, avocat du cabinet Linklaters. Peu de chances qu’il en soit de même avec l’euro «puisqu’il est question d’exemptions des paiements en rapport avec l’énergie», nuance-t-il.
La Suisse, quant à elle, a décidé d’infliger des sanctions à plus de 300 personnalités russes. En vigueur dès vendredi soir à 18h.
Les sanctions vont-elles assez loin?
Pour le président ukrainien Volodymyr Zelensky, «La pression sur la Russie doit augmenter», a-t-il tweeté. Les pays occidentaux se sont par exemple gardés de couper la Russie du réseau bancaire Swift, qui permet de recevoir ou d’émettre des paiements dans le monde entier. «C’est la toute dernière option», a affirmé vendredi Bruno Le Maire. Les sanctions évoquées ne sont «ni faibles ni lourdes», estime Stephen Le Vesconte. Elles sont le fruit «d’un compromis pour faire mal sans se tirer une balle dans le pied».
Sanctions contournables?
Est-il possible de contourner les sanctions ? En pratique, oui, répond Julien Martinet, avocat chez Swiftlitigation, mais les sociétés risquent gros à contourner les sanctions. BNP Paribas avait par exemple été condamnée à payer une amende colossale de 8,9 milliards de dollars pour avoir fait transiter de 2004 à 2012 par les États-Unis de l’argent au nom de clients soudanais, cubains et iraniens.
L’alternative au dollar est par ailleurs mise en avant par les producteurs de pétrole, dont Rosneft et Gazprom Neft, qui «ont déclaré que l’option de paiement en devises alternatives était incluse dans de nombreux contrats d’approvisionnement», explique John Plassard, analyste de Mirabaud. Nicolas Fleuret, spécialiste de l’industrie financière au sein du cabinet Deloitte, imagine enfin l’utilisation de cryptomonnaies «comme un véhicule de paiement» alternatif, la Russie «en produisant de plus en plus».