Guerre en Ukraine«Ma fille est morte ici»
Des Ukrainiens ont tenu à raconter ce que subissent des civils durant le conflit.

Cet habitant de Jytomyr a perdu sans fille suite à une frappe de missile russe.
Vidéo BBCDans la vidéo, on voit des habitants de Jytomyr, une ville à 125 kilomètres à l’ouest de Kiev, s’activer dans un secteur ravagé par un missile. Ils enlèvent les débris. Un homme veut alors témoigner devant la caméra. «On a entendu des tirs. Ma fille est morte. Mes voisins sont morts», dit-il, sobrement. «Si vous voulez voir comment on est traité par le monde russe, ce qu’ils font dans note Ukraine», lâche-t-il.
L’homme dit ensuite vouloir montrer le fossé créé par le missile, relate la BBC. Il se déplace de quelques mètres puis s’arrête, près de décombres. Plus rien n’est identifiable. «C’est ici. Ma fille a été tuée ici. Elle est allée aux toilettes et…» Il ne termine pas sa phrase. «C’est ce qui est arrivé», conclut-il, voulant montrer au monde la réalité subie par des civils ukrainiens. On ne connaît pas son identité. Ni l’âge de sa fille disparue.
Anton Gerashchenko, conseiller du ministre ukrainien de l’Intérieur, avait indiqué que quatre personnes «dont un enfant» avaient été tuées mardi à Jytomyr. Leurs logements ont été frappés par un missile de croisière russe qui visait apparemment une base aérienne voisine, rapporte Reuters.
Un autre habitant a posé pour les photojournalistes parmi les décombres de Jytomyr: Oleg Rubak, un ingénieur de 32 ans. Sa femme a été tuée par la frappe russe. Il a livré son témoignage à l’AFP.

La femme d’Oleg Rubak a perdu la vie dans la frappe russe sur Jytomyr.
AFPLa vie d’Oleg Roubak a basculé mardi soir un peu après 22 h, alors qu’il jouait avec sa fille d’un an et demi dans le salon de leur petite maison de bois et briques, tout près du centre de Jytomyr. Un premier missile a explosé d’un côté de la maison d’Oleg, celui où se trouvait sa femme. «Elle s’appelait Katia, elle avait 29 ans. Un instant je l’ai vue aller dans notre chambre, l’instant d’après, plus rien», raconte-t-il.
La seconde bombe a frappé quelques secondes après la première, de l’autre côté de la maison. Elle y a laissé un énorme cratère de près de 5 mètres de profondeur, au fond duquel stagne une eau boueuse, cernée de débris de murs, de charpentes ou de meubles. Oleg, qui jouait avec sa fille dans son salon, est soudain précipité au milieu des gravats dans la nuit noire et gelée. À tâtons, il cherche son téléphone portable, allume la lampe torche, trouve sa fille. «Elle ne bougeait plus, et tout s’est écroulé pour moi. Puis j’ai pris sa main, et là elle a commencé à pleurer. C’est le meilleur son que j’ai entendu de ma vie».
Sa femme, elle, est ensevelie sous des briques et restes de poutres. Oleg creuse à mains nues avec l’énergie du désespoir. «Je me suis arraché les doigts», dit-il en montrant ses phalanges écorchées et rouges à vif. Il finira par trouver sa dépouille: comme il le craignait, la première explosion ne lui a laissé aucune chance.
«J’espère que là, en ce moment, elle est au paradis, et que tout est parfait pour elle», glisse-t-il finalement. «Je dois rester fort! Je n’ai pas froid, je veux juste que tout le monde sache ce qui est arrivé», martèle-t-il. Et que Vladimir Poutine paye le prix fort pour avoir lancé cette guerre: «Je veux sa mort, je veux qu’il rôtisse en enfer pour l’éternité».