Guerre en UkraineDans les «villes martyres» près de Kiev, on déblaie pour reconstruire
Comme Gorenka ou Boutcha, beaucoup de cités proches de la capitale de l’Ukraine veulent revivre. Les survivants espèrent retrouver de quoi se loger dignement. Mais les bras manquent…
Avant même d’avoir posé la première brique d’une reconstruction qu’elle espère rapide, Zoïa Potapova a planté des fleurs derrière les ruines de sa maison près de Kiev, bombardée par Moscou en mars. À l’image de cette retraitée, les habitants des territoires au nord de Kiev, portant les stigmates du passage des Russes, croient en la promesse du gouvernement, qui souhaite «restaurer le parc» immobilier «endommagé».
Mais à Gorenka, petite localité pilonnée lourdement au début de l’invasion du pays, l’heure est encore à la débrouille pour Zoïa, dont le mari a été tué. «J’espère qu’on ne sera pas oubliés, car on a fait beaucoup pour stopper la progression en direction de la capitale», lance en larmes, à l’AFP, la retraitée tout habillée de noir, dans les gravats où la suie dégage encore une forte odeur.
En attendant, son grand potager est prometteur: sous les arbres fruitiers décapités par les éclats d’obus poussent rapidement, dans les cendres, des pommes de terre et des framboises.
Les bras et les matériaux manquent
Selon une responsable de Gorenka, Tetiana Chepeleva, 1000 dossiers ont déjà été remplis par des administrés au domicile rendu totalement ou partiellement insalubre. À la faveur des beaux jours, certains ont déjà commencé le gâchage du béton par eux-mêmes, mais les bras et «les matériaux manquent» dans ce bourg qui comptait 10’000 habitants avant l’invasion.
À Boutcha, où des corps de civils ont été découverts après le retrait des troupes envoyées par le Kremlin, 600 familles cherchent un toit et on réquisitionne les locations saisonnières vacantes. Avant le conflit, la ville était plaisante et appréciée des vacanciers. Les premiers relogés s’installent aussi dans des containers gris, déposés sur le parking d’un grand marché couvert qui n’est plus qu’un amas de tôle.
«C’est mis gratuitement à disposition par le gouvernement, et «il y a de la place pour 92 familles», explique le maire de Boutcha, Anatoli Fedorouk, en présentant des petits box d’une vingtaine de mètres carrés, pouvant chacun accueillir quatre personnes. Grâce à l’aide des Polonais, il doit recevoir trois autres camps préfabriqués.
«Je veux reconstruire ma vie ailleurs»
Oksana Polichtchouk découvre ces lieux d’une propreté impeccable, avec des toilettes désinfectées et des grands réfectoires aux murs colorés. Bénéficiaire, elle a l’impression de renaître, alors que son stand de produits alimentaires est parti en fumée, il y a plus de deux mois, juste à côté et qu’elle a miraculeusement survécu dans son immeuble à demi effondré.
Mais la commerçante de 41 ans ne se voit pas, avec ses petits de 9 et 6 ans, rester dans la région. «Je veux être dédommagée et reconstruire ma vie ailleurs», dit-elle en évoquant son actuel suivi psychologique et ses crises de panique. «Les Ukrainiens n’ont pas peur du chantier qui les attend», lâche-t-elle en se reprenant avant de dire au revoir. «Tout ce qu’on avait avant, on va le récupérer. La seule chose qui compte, c’est de gagner cette guerre.»