Hockey sur glace - Fabrice Herzog face à la justice civile

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Hockey sur glaceFabrice Herzog face à la justice civile

En février 2021, Eric Blum avait été victime d’une charge violente de l’attaquant de Zoug. Le défenseur du CP Berne a décidé de porter l’affaire devant les tribunaux.

André Boschetti
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André Boschetti
L’international suisse Fabrice Herzog devra affronter un tribunal civil.

L’international suisse Fabrice Herzog devra affronter un tribunal civil.

AFP

Fabrice Herzog (27 ans) est certainement l’un des meilleurs attaquants de notre championnat. Quatre ans près avoir fêté le premier titre de champion de Suisse de sa carrière, avec les ZSC Lions, l’attaquant international pourrait bien en ajouter un deuxième dans quelques semaines. Vainqueur de la saison régulière, Zoug part en effet avec les faveurs des pronostics dans sa demi-finale contre Davos, ce vendredi.

Tout n’est pourtant pas rose dans la vie de Fabrice Herzog. Comme le révèle Blick, le défenseur bernois Eric Blum a déposé une plainte au civil contre lui en décembre dernier. Pour mémoire, le Thurgovien avait adressé une très violente charge à la tête du défenseur bernois le 21 février 2021. Une agression qui avait  alors valu à ce récidiviste notoire huit matches de suspension et une amende de 11’150 francs. Une sanction contre laquelle Herzog n’avait pas fait appel. Dans son jugement, le juge unique avait précisé que «l'accusé a été condamné à plusieurs reprises et est considéré comme un récidiviste. L'accusé fait preuve d'un certain manque d'égards généralisé et ne semble pas non plus avoir été instruit par les sanctions disciplinaires qu'il a reçues par le passé.»

«Si je n'étais pas un sportif de haut niveau, on pourrait sans doute dire que je suis guéri»

Eric Blum, en septembre dernier dans Blick

Un incident qui ferait partie du passé si Eric Blum, dont le contrat avec le CP Berne se termine à la fin de ce mois, avait pu rejouer normalement suite à cette charge. Or, tel n’est toujours pas le cas. «Lorsque je dépasse une certaine limite de charge, les maux de tête reviennent et je ressens une sensation sourde dans les oreilles. Comme après un concert bruyant», expliquait-t-il au Blick en septembre. Dans sa vie quotidienne, Blum reconnaît toute fois ne ressentir aucun symptôme: «Si je n'étais pas un sportif de haut niveau, on pourrait sans doute dire que je suis guéri.»

Ce qui n’a donc pas empêché le défenseur de 35 ans de déposer une plainte pénale contre son ancien coéquipier en équipe de Suisse en décembre dernier. La question que doivent désormais clarifier le ministère public bernois et le juge pénal est de savoir si Herzog s'est rendu coupable, ou pas, d'une infraction. L'autorité chargée de l'enquête devrait, comme il est d'usage dans de tels cas, s'appuyer sur les faits du jugement de la justice sportive. Selon les experts en droit pénal, il est donc possible que le jugement du juge unique de la NL amène le juge pénal à condamner Herzog. Tout cela en se demandant à partir de quel moment la frontière entre le droit sportif et le droit pénal est franchie dans un sport qui autorise explicitement le contact physique.

Des millions en jeu?

Si Fabrice Herzog devait être condamné au pénal, cela pourrait l’inciter à demander ensuite des dommages et intérêts à hauteur de plusieurs millions. Blum avait certes expliqué, en septembre 2021, qu'il ne souffrait d'aucune gêne au quotidien et qu'il était guéri. Mais il a également déclaré qu'il n'était plus en mesure de pratiquer un sport de haut niveau. Enfin, le dossier médical sportif de Blum, qui comporte plusieurs commotions cérébrales documentées, devrait également être pris en compte pour l'évaluation de la situation globale. Il appartiendrait alors à Blum de prouver que c’est bel et bien l'incident du 14 février 2021 qui a causé de graves dommages à sa santé.

Pas une première en Suisse

Eric Blum n’est pas le premier sportif à recourir à la justice civile pour demander réparation. Le cas le plus médiatisé concerne le football et remonte à près de de trente ans déjà. Le 13 septembre 1985, au stade des Charmilles, Servette recevait Vevey. Au cours de ce derby, Gabet Chapuisat avait commis une violente faute sur Lucien Favre. Un tacle qui avait eu de graves conséquences physiques et professionnelles pour ce dernier: ligament croisé déchiré et rotule endommagée. Soit 8 mois d'arrêt complet de toute compétition.

Chapuisat avait d’abord été licencié par son club puis condamné par un tribunal à verser 5000 francs à Favre pour lésions corporelles par négligences.

Antisin devant le TF

En hockey sur glace, les litiges portés devant les tribunaux civils ont été plus nombreux. Comme, en janvier 1993, la charge de l’attaquant de Zoug  Misko Antisin contre Petr Malkov (Ambri) avait même été portée jusqu’au Tribunal fédéral. Antisin avait assommé Malkov d'un coup de genou. Le tribunal cantonal tessinois l'avait condamné à une amende de 3000 francs pour coups et blessures avec dol éventuel. Un jugement confirmé en 1995 par le Tribunal fédéral après une série d'appels. 

Le 31 octobre 2000, une mise en échec de l'attaquant du ZSC Andrew McKim par le Davosien Kevin Miller avait aussi fait grand bruit. Miller avait frappé son adversaire par derrière, avec le coude, à la tête. McKim avait été victime d'un traumatisme crânien qui l’avait contraint à mettre un terme à sa carrière. Miller avait été condamné par le tribunal de district de Zurich à trois mois avec sursis pour lésions corporelles légères et graves par négligence. Après son retour aux États-Unis, Miller a toutefois refusé de reconnaître la décision du tribunal suisse. Un tribunal américain l'a condamné à verser 1,6 million de dollars de dommages et intérêts pour préjudice moral 14 ans après le check.

5,5 millions pour Todd

Un choc entre Edgar Salis (Ambri) et le Zougois Kevin Todd le 7 février 1999 avait également eu des répercussions tardives puisque la scène n'avait été sanctionnée ni par l'arbitre ni par le juge unique. Le Canadien, qui avait dû mettre fin à sa carrière quelques matches plus tard, s'est battu sur tous les fronts avant de se voir enfin dédommagé à hauteur de 5,5 millions de francs. Sa plainte pour lésions corporelles avait pourtant été rejetée par le tribunal pénal de Zoug.

Pat Schafhauser (Lugano) et Ronny Keller (Olten), qui resteront paralysés à vie après des accidents sur la glace, avaient en revanche renoncé à porter plainte.

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