Jura: il fait tout un film sur la bière

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JuraIl fait tout un film sur la bière

Réaliser un reportage teinté de houblon, c’est bien, le diffuser, c’est mieux, mais Michael Beuchat manque de soutien.

Vincent Donzé
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Vincent Donzé

Un film consacré à la bière? La démarche du réalisateur jurassien Michael Beuchat correspond à un engouement certain pour les brasseries régionales, mais le succès de «La bière toute une histoire» n’est pas au rendez-vous. Avec 350 entrées en salles, la récompense est maigre pour deux ans de travail. «C’est décourageant», commente le cinéaste.

En 2019, dans son habit de mécanicien de précision, cet ancien employé de la fonderie de Choindez (JU) qui révisait la machinerie a filmé le métal en fusion avant l’arrêt définitif du dernier haut-fourneau helvétique.

Michael Beuchat a de la suite dans les idées. «Après la fonderie, je voulais me pencher sur une autre entreprise du XIXe siècle», explique le réalisateur. Michael s’est vite rendu compte que se consacrer uniquement à la brasserie Feldschlösschen revenait à réaliser un publireportage.

Chaque ville

Le cinéaste a élargi sa palette: «Chaque ville, pour ne pas dire chaque village possède sa bière artisanale», constate Michael Beuchat. Avec sa voix off, un spécialiste biennois a servi de fil rouge à ces visites en remontant jusque dans un monastère saint-gallois, mais si «Choindez, de feu et de fonte» a fait salle comble dans les cinémas de la région, «La Bière toute une histoire» est presque passé plus inaperçu, en dépit d’un profil «Facebook» qui lui est dédié.

Petite consolation: «À Genève, il y avait du monde et les spectateurs sont repartis contents», relate Michael Beuchat. Mais l’amertume lui est montée au palet: «Les réalisateurs jurassiens ne sont pas soutenus par le cinéma suisse», assène-t-il.

«Le canton contribue financièrement à l’association Ciné Forum, mais aucune aide ne revient dans la périphérie», poursuit le réalisateur. L’Office fédéral de la culture n’a rien fait pour mettre ses finances à flot et la RTS rechigne à diffuser le reportage dans son format initial de 70 minutes.

Une excuse

Michael sait pourquoi son reportage a été recalé: «Mon film manque de dramaturgie, m’a-t-on dit». Selon lui, «on trouve chaque fois une excuse pour écarter les cinéastes jurassiens». Sa déception devient une colère: «Les décideurs veulent des drames où tout le monde pleure. Il me manque un brasseur pleurnichard, transgenre ou multiculturel…», s’exclame-t-il.

Par mesure d’économie, Michael Beuchat s’est chargé de la distribution de son film en s’adressant aux exploitants de salles. Le coup de massue est venu des brasseurs qui, à deux exceptions près, n’ont pas assisté aux premières diffusions. «Le bouche-à-oreille n’a pas fonctionné», regrette le réalisateur.

Sous-titrage

Après une tournée romande, «La bière toute une histoire» sera diffusé à Berne le 4 septembre prochain, avec un sous-titrage, puis à Liestal (BL). Le film va-t-il décoller dans les salles alémaniques? Michael Beuchat ne se fait guère d’illusion: «Avec une pandémie suivie d’une canicule, les cinémas suisses sont en difficulté», dit-il.

Établi à Courgenay (JU), Michael Beuchat met du beurre dans les épinards en filmant les exercices militaires à la caserne de Bure. La caméra, Michael Beuchat l’a maniée pour filmer un restaurateur ambulant, des forts militaires, les abeilles de son beau-père…

Persévérant, il remet l’ouvrage sur le métier: «Mon prochain film sera consacré à une école de Courgenay qui m’a inspiré avec sa manière d’enseigner», promet-il. Avec cette précision: «En suivant une famille, j’aurai de la dramaturgie…».

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