Basketball: Ce qu’il faut retenir après Suisse – Autriche

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BasketballCe qu’il faut retenir après Suisse – Autriche

Une volonté folle, l’«incompréhension» engendrée par Natan Jurkovitz, le «statement» du sélectionneur: retour sur le succès suisse à Fribourg avant l’envol pour la Croatie.

Jérémy Santallo
par
Jérémy Santallo Fribourg
Le nouveau joueur des Lions de Genève Noé Anabir a connu sa première sélection, jeudi, contre l’Autriche.

Le nouveau joueur des Lions de Genève Noé Anabir a connu sa première sélection, jeudi, contre l’Autriche.

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Une envie débordante

Il fallait voir la montagne autrichienne Jozo Rados (207 cm) tirer la langue – alors que le premier quart-temps n’était même pas arrivé à son terme – pour réaliser l’engagement mis dans chaque mouvement par son vis-à-vis, Laurent Zoccoletti, sur un parquet.

L’énergie diffusée par l’ancien couteau suisse du BBC Nyon, qui évoluera cette saison du côté de Massagno, est contagieuse et c’est tout un groupe qui s’en est nourri. Dominée au rebond à la mi-temps (10-21), la Suisse s’est rebiffée ensuite (31-35). «La façon dont nous nous sommes battus, sans joueur intérieur de métier, c’est peut-être notre plus grande fierté, a concédé l’ailier genevois Toni Rocak (11 points mais à 4/15 au tir). Lorsque l’on a des absents et des blessés, on peut se chercher des excuses ou trouver des solutions. Ce soir, (ndlr: jeudi), on a trouvé des solutions. Tout le monde s’est donné et on a montré que l’on avait plus envie de gagner.»

En conférence de presse, le sélectionneur autrichien Chris O’Shea a reconnu que ses protégés avaient été dépassés par l’intensité adverse. «Lors des dix dernières minutes, certains de mes joueurs avaient les jambes fatiguées. Cela a affecté notre pourcentage au tir et contribué à nos pertes de balles (19)

L’«imbroglio» Natan Jurkovitz

On met des guillemets parce qu’au final, l’équipe de Suisse s’est imposée (74-64) et tout est bien qui finit bien. Mais en débarquant à la salle Saint-Léonard, on a découvert un Natan Jurkovitz en tenue mais pieds nus, vissé sur le banc. Avec les absences de Jonathan Dubas, Arnaud Cotture, Michel Ofik-Nzege et Killian Martin, cela semblait clairement être celle de trop pour Ilias Papatheodorou.

Très vite, une rumeur s’est propagée. L’ailier de Fribourg se serait blessé à la cheville au cours d’une séance vidéo la veille. Drôle, surtout lorsque l’on doit s’envoler deux jours plus tard pour Debrecen pour y disputer une épreuve du World Tour en 3x3. En conférence de presse, on a demandé au sélectionneur s’il pouvait expliquer l’absence de son joueur cadre. «Pas vraiment, a lâché le Grec. Après l’entraînement de mercredi, il a commencé à ressentir une vive douleur à la cheville. Il a cru que c’était plus raisonnable de ne pas jouer.»

Sur le chemin pour la Hongrie avec Team Fribourg vendredi matin, l’aîné des Jurkovitz a livré sa version. «Ma cheville a gonflé de nulle part et c’est ce qui a créé une incompréhension. J’ai testé pour voir si je pouvais jouer mais c’était impossible», nous a-t-il écrit. «Je suis parti avec le 3x3, on verra bien. On se déplace avec un physio donc je serai de toute façon bien suivi.»

Le «statement» de Papatheodorou

Il faut se mettre à sa place. Lorsque l’on est sélectionneur de l’équipe de 5x5, supposée être la vitrine de son sport au pays, on souhaite avoir les meilleurs éléments à disposition pour effectuer au mieux son job. Mais lors des dernières fenêtres internationales, Papatheodorou a été contraint de bricoler – il l’a fait avec brio – parce que la nouvelle Team Fribourg de 3x3 «l’ampute» de plusieurs éléments-clés.

Alors jeudi soir, il avait envie de faire passer son message. «Je veux d’abord féliciter nos joueurs. Ce n’est pas facile de battre deux fois de suite une sélection comme l’Autriche. Devant cette adversité et nos absences, c’est une belle performance et une grosse victoire, a déclaré le Grec. On a essayé de trouver un moyen de survivre à une étrange situation. On a eu le même problème lors de la dernière fenêtre en juin. Beaucoup de joueurs ont refusé de venir et de jouer. Moi, je respecte les joueurs présents, qui travaillent vraiment dur. Ils ont commencé la préparation il y a plus de deux semaines et ont sacrifié leur été, leur temps, pour représenter de la meilleure façon possible leur pays. Donc on a essayé de trouver de nouveaux gars qui veulent être avec nous, qui sont fiers de faire partie de cette sélection. Pour moi, c’était une priorité.» Voilà qui est dit.

Des rookies au niveau

Ils sont trois à avoir fêté jeudi leur première sélection en équipe nationale: Noé Anabir (27 ans), Eliot Kübler (24) et Laurent Zoccoletti (22). Le premier, Anabir, n’a pas noirci la feuille de statistiques mais a montré une belle présence dans la raquette, notamment en première mi-temps. «Je suis content de moi. J’ai surtout fait le sale boulot mais je pense avoir apporté beaucoup d’énergie en sortant du banc, a expliqué l’ex-joueur d’Union Neuchâtel. On manquait de taille mais malgré ça, on a bien contenu leurs grands. On s’est donné corps et âme et c’est pour cela qu’on gagne. C’était un honneur pour moi de porter ce maillot senior pour la première fois.»

Comme Zoccoletti – qui devra défendre un peu plus avec sa tête à l’avenir pour éviter les fautes stupides (il est sorti définitivement pour cinq fautes avant la fin de la partie) –, Eliot Kübler a commencé d’entrée dans le cinq de base. Et l’ailier de Vevey, promu en SB League cette saison, mérite clairement d’être revu. «Je suis fier pour Kübler, qui vient de deuxième division, a réagi Papatheodorou. Zoccoletti et Anabir nous ont aussi beaucoup aidés.» C’est sûr: les trois rookies ont marqué des points.

Robert Zinn MVP

Lui en a marqué dans le sens premier du terme. Robert Zinn n’est pas le joueur le plus flashy de la planète mais lorsque l’on a besoin de lui, l’ancien arrière de Fribourg parti à Lugano répond quasi toujours présent. Alors que Jonathan Kazadi et Roberto Kovac ne trouvaient pas la cible en première mi-temps, il a assuré le scoring et maintenu les siens à flots. Avec 14 points et 13 d’évaluation, il a été désigné meilleur joueur de sa sélection et c’est largement mérité. «C’est presque une petite surprise d’avoir gagné, sans vrai poste 5, a-t-il avoué en salle de presse. Mais c’est aussi notre force depuis quelques mois. À chaque match, un nouveau joueur sort du lot. J’avais un bon rythme en première mi-temps et lors de la deuxième, d’autres gars ont aidé.»

Un banc tonitruant

Quand il parle de ceux qui ont brillamment pris son relais, Robert Zinn évoque sans les citer Selim Fofana et Juraj Kozic. Ces trois-là font partie des cinq qui ont terminé la partie avec plus de dix points. Neuvième homme dans la rotation de Papatheodorou jeudi, Fofana a eu un impact certain (10 points en 20 minutes), surtout en deuxième mi-temps. Le nouveau joueur du KK Podgorica Bemax (Monténégro) fait partie de ceux qui ont fait mal à l’Autriche par la vivacité.

Ce n’est pas la qualité première de Juraj Kozic, que l’on a failli pas reconnaître à Fribourg. Délesté de plusieurs kilos et de sa longue chevelure, l’ailier n’est toujours pas le plus à l’aise dans l’utilisation du pick-and-roll et a eu pas mal de déchet (4 ballons perdus). Mais il a compensé tout ça avec une jolie adresse extérieure (13 points à 5 sur 6 au tir) et une volonté défensive qu’on l’avait rarement vu autant décuplée chez lui. Et rien que parce que l’on s’est très souvent demandé pourquoi il était sélectionné, cela méritait d’être écrit.

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