Droit de timbre: l'étrange logique d'Ueli Maurer

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CommentaireDroit de timbre: l'étrange logique d'Ueli Maurer

Notre ministre des Finances est sur tous les fronts pour obtenir la suppression de l'impôt, le 13 février. Sa démonstration laisse songeur.

Eric Felley
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Ueli Maurer: «En tant que ministre des Finances, j’assume une grande responsabilité dans l’attractivité et la croissance de l’économie suisse. Les baisses d’impôts peuvent y contribuer»

Ueli Maurer: «En tant que ministre des Finances, j’assume une grande responsabilité dans l’attractivité et la croissance de l’économie suisse. Les baisses d’impôts peuvent y contribuer»

AFP

En direct sur le site de l’UDC, en interview dans «Le Temps» ou en page 2 du tous-ménages de l’USAM, le chef des Finances fédérales mène une campagne intensive en vue de supprimer le droit de timbre d’émission le 13 février prochain. Dans le tous-ménages, Ueli Maurer démonte l’apparente contradiction qu’il y a dans ses fonctions à supprimer un impôt qui rapporte 250 millions de francs à la Confédération: «En tant que ministre des Finances, j’assume une grande responsabilité dans l’attractivité et la croissance de l’économie suisse, répond-il. Les baisses d’impôts peuvent y contribuer».

«…avant même d’avoir gagné le moindre franc»

Son argumentation est calquée sur celle d’EconomieSuisse: «Cette suppression aura un effet positif sur l’ensemble de l’économie et sur l’attractivité de la place économique suisse», explique-t-il. Le fait de taxer les fonds propres des entreprises est une injustice: «Elles doivent payer un impôt avant même d’avoir gagné le moindre franc», constate-t-il dans «Le Temps». Avec cet impôt, la Suisse freine ses start-up et ses PME, dont certaines vont voir ailleurs, où il n’existe pas. Jusque-là, on peut suivre ce raisonnement.

Tout bon pour les salariés?

Là où l’on décroche, c’est quand il veut démontrer que, en fin de compte, cette suppression du droit de timbre profitera in fine aux travailleurs. L’argent ainsi économisé par l’entrepreneur se retrouverait par la magie du ruissellement dans la poche du salarié: «L’important n’est pas de savoir qui paie les impôts, explique le chef des Finances, mais qui les supporte en fin de compte. C’est particulièrement important pour la fiscalité sur les entreprises: ces dernières paient des impôts, mais elles en répercutent la charge sur les employés, les bailleurs de fonds, les consommateurs, en réduisant les salaires ou en augmentant les prix. La suppression du droit de timbre d’émission profite donc également aux salariés».

Dans un monde de bisounours

Il ajoute comme une conclusion limpide: «La suppression ne profite donc pas seulement aux entreprises, mais à chacun de nous.» Voilà un sacré retournement de situation, car, sur le principe, c’est justement l’impôt qui permet une redistribution à «chacun de nous» et non pas l’argent à disposition d’un entrepreneur qui l’utilise à sa guise. Et, franchement, il y a tout de même peu de probabilités dans ce bas monde concurrentiel, que l’entrepreneur décide d’augmenter ses salariés avec les liquidités économisées sur la perception du droit de timbre! Ce serait plausible dans un monde de bisounours, mais pas dans celui des requins de la finance helvétique.

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