TennisNovak Djokovic, si près… si loin
Ce samedi matin contre «Sascha» Zverev (3h), le N°1 mondial tentera de franchir l’avant-dernière marche qui le sépare du plus grand exploit de l’ère Open: le Grand Chelem.


Novak Djokovic vient de battre Matteo Berrettini. Il sait qu’il n’est plus qu’à deux victoires du Grand Chelem. (Photo by Ed JONES / AFP)
AFPCe samedi au petit matin, l’histoire du tennis va prendre un premier virage décisif. Deux victoires, six sets, environ une centaine de jeux et à peu près 40 heures séparent Novak Djokovic de ce que le tennis a toujours considéré comme son plus grand exploit: le Grand Chelem calendaire. Qu’importe l’image retenue, le décompte donne le tournis. 52 ans après Laver, 33 ans après Graf, «Nole» se retrouve dans la même position que Serena Williams en 2015, lorsque Roberta Vinci fit dérailler la grande Histoire. La preuve que le Graal peut vous glisser des mains jusqu’au dernier moment.
Le rappel a valeur d’avertissement. Il n’est pas nécessaire «de servir du Haut de l’Empire State Building» comme Alexander Zverev (copyright Wilander) pour déboulonner une statue. Parfois le poids de l’Histoire suffit à tout faire trembler. Pour rappel, seuls trois femmes - Maureen Connoly (1953), Margaret Court (1970) et Steffi Graf (1988) - et deux hommes – Donald Budge (1938) et Rod Laver (1962, 1969) - ont réussi l’incroyable exploit de triompher aux quatre coins du monde la même année. Et seule Steffi Graf l’a fait sur trois surfaces différentes puisque longtemps, l’US Open et l’Open d’Australie se disputaient sur gazon.
Bien plus qu’un 21e titre Majeur qui le détacherait du duo Federer-Nadal, Novak Djokovic joue donc ce week-end pour devenir le premier homme à réaliser le plus parfait Grand Chelem. Un exploit si monumental que le Serbe tente de le chasser de son esprit. «Si je commence à trop y penser, cela me pèse mentalement, a-t-il admis après sa victoire en quatre sets contre Berrettini. Nous en parlerons dimanche, j’espère.»
Si le N°1 mondial a décidé de laisser l’histoire de côté en cette fin de quinzaine – il en a abondamment parlé lors de la première semaine – c’est sans doute qu’il sait que sa quête va prendre une tournure différente dans les heures qui viennent. De l’autre côté du filet se dresse en effet Alexander «Sascha» Zverev, l’homme qui l’a privé de l’or olympique à Tokyo, trois ans après l’avoir estourbi lors d’une finale du Masters que le Serbe avait traversée étonnamment inoffensif.
«Gagner à Tokyo contre le numéro 1 mondial, surtout après avoir été mené d’un set, avec un break de retard, c’était quelque chose de fort»
«Cette année, personne n’avait pu battre Novak dans un grand match, dans un tournoi du Grand Chelem. J’ai l’impression que j’ai été le premier joueur à le faire et cela vous procure quelque chose, a confié l’Allemand mercredi soir. Les Jeux olympiques, c’était le plus grand tournoi du monde pour moi. Gagner là-bas contre le numéro 1 mondial, surtout après avoir été mené d’un set, avec un break de retard, c’était quelque chose de fort, une expérience différente.» Différente et fondatrice? C’est ce qu’espère un «Sascha» Zverev passé à deux points du titre l’année dernière à New York mais toujours en quête d’une première victoire contre un «top 10» dans un match au meilleur des cinq manches.
«Même si Djoko est le meilleur joueur de ciment de l’histoire, il s’agit aussi de la meilleure surface des jeunes comme Zverev, Medvedev, Rublev et Auger-Aliassime, écrivait Mats Wilander dans L’Équipe au début du tournoi (ndlr: bien vu Mats, trois sur quatre sont en demi-finale!). Le rebond y est plus prévisible ce qui rend leurs coups plus propres. Et comme ils sont plus puissants que Djokovic, ils sont capables de le mettre à trois mètres de la balle.» C’est exactement ce qui était arrivé à Tokyo, lorsque soudain, l’Allemand laissa sortir son bras comme si plus rien ne pouvait lui arriver.
«Sascha» Zverev est-il capable de retrouver cet état tout à l’heure dans l’atmosphère électrique du «Ashe» pour se mettre en mode «Wawrinka 2016»? Ou Novak Djokovic va-t-il faire parler une fois de plus sa formidable science des temps d’un match et absorber la puissance adverse? De cette question dépend l’un des plus beaux chapitres de l’histoire du tennis.