Session d’hiverLe National veut lui aussi autoriser les listes noires d’assurés
Comme le Conseil des États, la Chambre du peuple, malgré le veto de la gauche, a estimé que les cantons devaient pouvoir tenir des listes noires d’assurés en retard dans le paiement de leurs primes d’assurance maladie.


Les Chambres souhaitent que les cantons puissent tenir des listes noires d’assurés.
Canton de Saint-GallLes cantons devraient pouvoir tenir des listes noires d’assurés en retard dans le paiement de leurs primes d’assurance maladie. Après les sénateurs, le National a approuvé à son tour jeudi, par 98 voix contre 92, un projet en ce sens de la commission du Conseil des États. Il faisait suite au dépôt d’une initiative lancée en 2016 par le canton de Thurgovie.
Actuellement, seuls les cantons d’Argovie, de Lucerne, du Tessin, de Zoug et de Thurgovie utilisent les listes d’assurés en retard de paiement. Le gouvernement du canton de Saint-Gall les a abolies depuis le 1er décembre. Depuis le début de l’année, plus aucun canton n’inclut les mineurs dans les listes. Les personnes figurant sur ces listes ne peuvent être traitées qu’en cas d’urgence. Cette notion a été précisée dans la loi que le Conseil des États avait approuvée en juin.
«Un danger pour la santé publique»
La gauche s’est pourtant démenée pour faire capoter le projet. «Ces listes ne fonctionnent pas», a relevé Manuela Weichelt (Verts/GL). «Les Grisons y ont d’ailleurs renoncé depuis le décès tragique d’un homme auquel l’assurance maladie avait refusé de financer les médicaments nécessaires, a-t-elle rappelé.
Dans les cantons disposant de listes noires, 30’000 assurés sont frappés d’une suspension des prestations. «Ces suspensions représentent non seulement un danger pour l’individu, mais aussi pour la santé publique. Dans le cas des maladies infectieuses, un accès limité aux soins médicaux peut entraîner une propagation des maladies, ce qui est inacceptable», a-t-elle argumenté en vain.
«La voie vers une médecine à deux vitesses»
Léonore Porchet (Verts/VD) a elle souligné que la limitation ou l’interdiction de l’accès aux soins était contraire à la Constitution. Elle a souligné en outre que la précarité touchait 8% de la population, soit plus de 700’000 personnes qui peinent à payer leurs primes. «Il ne faut pas les pénaliser encore plus», a-t-elle demandé. Les précariser davantage mettrait aussi en danger, sur le plan médical, un groupe de population particulièrement faible économiquement, selon elle. «C’est la voie ouverte à une médecine à deux vitesses», estime-t-elle. «Ces listes causent beaucoup de souffrance et n’apportent rien», a poursuivi Yvonne Feri (PS/AG).
Le National a toutefois modifié quelque peu le projet du Conseil des États. Pas question que les assurés en retard de paiement soient affiliés à un modèle d’assurance alternatif, tel que celui du médecin de famille. Ils pourront toutefois changer d’assureur.
Jeunes adultes en formation exclus de poursuites
Les députés ont en outre souhaité que les caisses maladie puissent être remboursées directement au moyen d’une retenue faite par l’employeur sur le salaire de l’assuré. «C’est un véritable ovni dans la loi sur la poursuite pour dettes et faillites puisque, contrairement à d’autres créanciers, les caisses pourraient se servir directement dans les salaires», a critiqué en vain Philippe Nantermod (PLR/VD). «C’est une exception qui n’a pas sa place».
La Chambre des cantons avait déjà accepté que les enfants ne soient plus tenus pour responsables des primes impayées par leurs parents. Les poursuites introduites à leur encontre pour les primes et participations aux coûts seront donc nulles. Le National a suivi ce projet mais propose d’aller plus loin en incluant les jeunes adultes en formation. Enfin, le nombre de poursuites sera limité à deux par année au lieu de quatre. Les montants des frais de rappel et de sommations des assureurs devraient également être limités pour ne refléter que les frais effectifs des assureurs.
Au vote sur l’ensemble, le projet a été adopté par 191 voix et une abstention. L’objet retourne au Conseil des États.