MédecineDes requins comme armes contre les coronavirus
Des anticorps de ces animaux se sont révélés efficaces contre plusieurs souches du virus actuel. Ils pourraient nous protéger contre de futures épidémies.


Les anticorps pour lutter contre les coronavirus ont été extraits de requins-nourrices.
Getty Images/iStockphotoDes chercheurs de l’Université du Wisconsin, à Madison (USA) ont testé des anticorps de requins sur des souches du coronavirus. Cela a fonctionné, ils ont désactivé le virus. Comment ont-ils eu l’idée d’utiliser des protéines de ces animaux? Le système immunitaire des requins abrite les plus petits anticorps existants chez les vertébrés, ils sont dix fois plus petits que ceux de l’homme. Ils peuvent ainsi s’attaquer à des zones des virus inaccessibles aux anticorps plus gros.
Les scientifiques ont donc testé ces VNAR (Variable New Antigen Receptors) issus de requins-nourrices, tout d’abord sur un coronavirus appelé WIV1-CoV, explique le communiqué de l’Université. Il est capable d’infecter l’homme mais ne circule actuellement que chez les chauves-souris. Ils sont parvenus le neutraliser.
Ensuite, les chercheurs ont testé ces VNAR contre le SRAS-CoV-2 infectieux et un «pseudo-type», une version du virus qui ne peut pas se répliquer dans les cellules. Parmi le milliard de VNAR candidats, ils sont parvenus à en identifier trois qui ont empêché le coronavirus de contaminer les cellules humaines. et qui sont également efficaces contre le SRAS-CoV1 qui avait déclenché une épidémie en 2003.
L’un, nommé, nommé 3B4, s’est fortement attaché à un sillon sur la protéine de pointe du virus près de l’endroit où il se lie aux cellules humaines et a bloqué ce processus d’attachement. Comme ce sillon est très similaire sur des coronavirus génétiquement divers, 3B4 est capable également de neutraliser efficacement le virus MERS, qui était apparu au Moyen-Orient en 2012.
Efficace contre les variants
Ce site de liaison attaqué par 3B4 est le même chez les variants principaux du coronavirus actuel, tel que Delta. Cette recherche a été menée avant la découverte d’Omicron, mais les modèles initiaux suggèrent que le VNAR resterait efficace contre cette nouvelle version, dit Aaron LeBeau, professeur agrégé au Département de pathologie et de médecine de laboratoire et codirecteur de l’étude parue dans «Nature Communications».
Le deuxième VNAR de requin le plus puissant, 2C02, semble verrouiller la protéine de pointe dans une forme inactive. Cependant, le site de liaison de ce VNAR n’est pas le même dans certains variants, ce qui en fait un moins bon candidat.
Pas pour tout de suite
Si ces résultats sont prometteurs pour trouver des traitements à base de VNAR, ceux-ci ne seront pas disponibles pour combattre la pandémie actuelle mais pourraient permettre de se préparer à d’autres à l’avenir. «Le gros problème est qu’il existe un certain nombre de coronavirus qui sont sur le point d’émerger chez l’homme, explique Aaron LeBeau. Ce que nous faisons, c’est préparer un arsenal de thérapies VNAR pour requins qui pourraient être utilisées ultérieurement pour de futures épidémies de SRAS. C’est une sorte d’assurance contre l’avenir».
Les thérapies futures incluraient probablement un cocktail de plusieurs VNAR de requins pour maximiser leur efficacité contre des virus divers et leurs mutations. Cette nouvelle classe de médicaments est moins chère et plus facile à fabriquer que les anticorps humains, et peut être administrée dans le corps par diverses voies, mais n’a pas encore été testée chez l’homme, selon le communiqué.
L’avantage également de ces médicaments, qui ne remplacent pas les vaccins, c’est que justement, certaines personnes dont le système immunitaire est affaibli répondent moins bien à la vaccination. Des traitements aux anticorps leur sont donc utiles.