JO 2022 – Et voilà qu’il neige. Comme par hasard!

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JO 2022Et voilà qu’il neige. Comme par hasard!

On nous a tellement raconté qu'en Chine, le pouvoir pouvait faire tout et n'importe quoi, qu'on commence à croire à peu près n'importe quoi, aux Jeux de Pékin.

Robin Carrel
par
Robin Carrel Zhangjiakou
Le balais des balais pour enlever la neige.

Le balais des balais pour enlever la neige.

AFP

Avant de venir aux Jeux olympiques de Pékin, j'ai fait mes devoirs. J'ai lu plein de choses sur la politique locale, mais aussi les pages Wikipédia complètes sur la ville, la région et le pays. Comme d'habitude quand je pars en reportage à l'étranger. Mais la Chine - comme la Russie lors de la Coupe du monde 2018 par exemple -, c'est tellement une sorte de mythe quand tu viens depuis la démocratie directe de la Suisse, que tu creuses encore plus loin.

C'est un peu bête, parce que ça fait arriver dans un nouvel environnement avec des tonnes d'idées préconçues. Avec des a priori tellement occidentaux, que quand on voit la vérité devant nos yeux, on peine à se croire soi-même. Ca me l'avait déjà fait à Moscou, ça me l'a refait autour de Pékin. Parce qu'en vrai, ces êtres humains sont tellement comme nous que ça fait se sentir bête à un point pas possible quand on a cru tout ce qu'on a pu lire.

Parce que les idées toutes faites sont légion, sur ces pays tellement différents du nôtre - tu m'étonnes. Comment veux-tu gérer une contrée d'onze fuseaux horaires comme la Russie ou de 1,4 milliards d'habitants comme la Chine, alors que toi tu viens d'un pin's d'à peine quelques cantons -. Et forcément, j'ai tout lu des dangers qui allaient nous accompagner au pays de Xi Jinping. On allait nous suivre sur nos téléphones, nos ordinateurs. L'application des JO allait trouver nos secrets les plus inavouables...

Cette neige n’a pourtant pas l’air si agressive que ça.

Cette neige n’a pourtant pas l’air si agressive que ça.

Et puis quoi? Des gens vont m'espionner pour savoir ce que je fais, où je suis, ce que j'aime, ce dont j'ai envie? Je suis sur Instagram, Twitter, WhatsApp - bon, plus sur Facebook, que j'ai quitté peu avant la pandémie, meilleure décision de ma vie -, Google sait même mieux que moi où je suis allé certains soirs... Et je devrais avoir peur que le gouvernement chinois m'espionne? Notez que le raisonnement est le même pour le vaccin et sa 5G, hein.

Mais là où je me suis rendu compte que j'étais devenu totalement paranoïaque, limite agent de la NSA dans les films, c'est quand je me suis mis à me questionner pour savoir si les Chinois n'étaient pas tellement forts qu'ils ont fait neiger exprès pour nous, pour les JO. Parce que dans le coin, à en croire les statistiques, il tombe des flocons à un niveau maximal de sept centimètres par mois. On est dans une région qualifiée de «semi-aride» et, pourtant, on a vu de nos yeux vu tomber près de quinze centimètres en une vingtaine de jours!

Et puis quand je vous dis qu'il a neigé, c'étaient des truc costauds, hein! Il avait beau faire moins quinze degrés jeudi soir, c'était limite des pizzas, comme l'aurait dit Bernard Jonzier ou Fabrice Jaton, je ne sais plus. Mais comme on est en Chine, je me suis demandé si le gouvernement n'avait pas réussi à «faire neiger», car on sait qu'il est capable de «faire pleuvoir» s'il le veut, autour de la capitale. Sérieusement, jeudi, j'ai bien regardé, il neigeait alors que je voyais le soleil, puis la lune quelques heures plus tard... Mais ça, c'était après l'apéro pour noyer la disqualification de Fanny Smith, alors je ne suis plus très sûr.

On se pose des questions. On voit la lune, mais il tombe de gros flocons!

On se pose des questions. On voit la lune, mais il tombe de gros flocons!

En décembre 2020, le gouvernement de Pékin avait annoncé donner un coup d'accélérateur à un programme de «modification météorologique»... Il voulait pouvoir faire décider de la météo sur une zone de quelque 5,5 millions de kilomètres carrés, soit plus de la moitié du pays, d'ici à 2025. À l'heure actuelle cet effort ne concerne «que» 3 millions de kilomètres carrés. Depuis 2002 à 2012, par exemple, la Chine aurait procédé à plus de 560’000 manipulations météos.

Comment? Facile, il suffit de balancer des roquettes et des projectiles dans le ciel. Grâce à ça, 489,7 milliards de tonnes de pluie seraient tombées sur le pays, soit l'équivalent en eau de trois fois le contenu d'un gros barrage du coin. De là à se demander si les autorités locales ont décidé de faire neiger sur les Jeux pour faire joli, il n'y a qu'un coup de carre qu'on a allégrement dépassé à la suite de l'après-ski. Et puis bon, on a bien des fusées anti-grêle, chez nous…

Moi, finalement, tout ce que je vais retenir, c'est les gens. Comme d'habitude. On peut faire dire ce qu'on veut aux enjeux géopolitiques et stratégiques, en allant sur place, moi je veux me faire mon idée des humains que j'ai en face de moi. Et en Chine, je n'ai eu à faire qu'à de la gentillesse, de la serviabilité, même des fois poussé à l'extrême. Exemple bête: chercher un hôtel à Pékin pour les deux dernières nuits sur place. En deux mails, c'est réglé. Le responsable de l'endroit me félicite pour ma rapidité parce que je lui ai répondu rapidement. Je le re-remercie dans la foulée, forcément. Et lui le refait, derechef.

Chez nous, sans vouloir dénoncer, j'aurais sans doute juste eu l'immense honneur de dépenser mon argent dans un endroit tellement beau, que les autochtones m'auraient fait une fleur d'aller chez eux pour payer cinq francs un café et quarante-deux francs un bout de viande indéterminé.

Et puis elle est beaucoup trop bizarre pour être honnête, cette neige.

Et puis elle est beaucoup trop bizarre pour être honnête, cette neige.

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