Jura bernois – Sa main d’or lui coûte un saladier

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Jura bernoisSa main d’or lui coûte un saladier

Le détectoriste qui a découvert un trésor archéologique doit payer une amende, mais pas les fouilles qu’il a provoquées.

Vincent Donzé
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Vincent Donzé

Il y aura cinq ans cette année, un samedi, le détectoriste Massimo Beck participait à une découverte sensationnelle alors qu’il dépolluait un champ agricole à Prêles (BE): une main de bronze ornée d’or vieille de 3500 ans. Remise le lundi suivant au Service archéologique du canton de Berne, cette trouvaille lui a valu… une amende de 2500 francs, peine confirmée en deuxième instance par la Cour suprême bernoise, selon «Le Quotidien Jurassien».

C’est parce qu’il était dépourvu d’autorisation que le Service archéologique a poursuivi Massimo Beck pour infraction à la loi sur le patrimoine, tout en exposant sa trouvaille dans des musées. En sus de l’amende, le détectoriste a été condamné à payer 5050 francs de frais de justice.

Mauvais message

«Cela donnera un mauvais message aux détectoristes intègres et respectueux, ils n’oseront plus apporter leurs découvertes au risque de se faire amender», estimait l’Association romande des utilisateurs de détecteur de métaux de loisir, après le jugement initial du Tribunal régional Jura bernois-Seeland.

Faute de moyens financiers, le détectoriste ne défendra pas sa cause devant le Tribunal fédéral. Un appel public lancé à des donateurs potentiels ne lui a rapporté que 100 francs. Mais la Cour suprême a donné raison à Massimo Beck sur un point capital: ce n’est pas à lui de payer la fouille consécutive à sa découverte. Montant de cette prétention civile: 171 000 francs!

Frais de défense

La Cour suprême n’a pas seulement confirmé que le coût de la fouille incombait au canton, contraint d’inventorier la découverte: elle lui a attribué les frais de défense du détectoriste concernant ce volet de l’affaire.

Confronté à une procédure judiciaire alors qu’il a remis un trésor au Service archéologique, Massimo a pris un coup sur la tête: «J’ai l’impression d’avoir été téléporté hors de la réalité, dans un film de fiction», dit-il. Que ferait-il s’il découvrait la main droite? «Je ne me pose pas cette question: pour trouver la main gauche, il fallait autant de chance que pour gagner à l’EuroMillions», dit-il.

Grand public

S’il élude cette question théorique, c’est aussi parce que ce représentant n’intervient plus avec son détecteur sur le territoire bernois, sauf à de rares exceptions, pour quelqu’un qui a perdu une alliance, un médaillon ou des clefs. Quand la main d’or est présentée dans un musée, les noms de ses deux découvreurs ne sont pas mentionnés. Ni le sien, alors qu’il maniait une pelle, ni celui de son collègue, qui tenait un détecteur et qui n’a pas recouru contre son amende: «Je n’ai pas de problème d’ego. L’important, c’est que la main soit présentée au grand public», indique Massimo Beck.

Tout au plus Massimo Beck concède-t-il un peu d’amertume d’avoir été présenté comme un pilleur de tombes, lui qui ne fait que dépolluer des champs. «Je ne fais pas, et je n’ai jamais fait de fouilles archéologiques», conclut-il. S’il n’avait pas découvert la main en pratiquant de la détection de loisirs à une profondeur de 20 à 30 cm, contre 50 à 150 cm pour l’archéologie, la charrue d’un paysan aurait peut-être fini par détruire ce trésor unique en Europe.

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